La clause attributive de juridiction : définition, conditions et effets

Par Maxime Bizeau, Avocat de formation, diplômé de l'école d'avocats du Barreau de Paris

clause attributive de juridiction

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La clause attributive de juridiction : définition

La clause attributive de juridiction (ou clause attributive de compétence) est la clause d’un contrat qui précise par avance quelle juridiction sera compétente en cas de litige.

En principe, la juridiction compétente est en effet déterminée par des règles de compétence fixées par la loi. Ces règles déterminent :

  • la compétence d’attribution, c’est-à-dire quelle juridiction est compétente en fonction de la nature du litige ; et
  • la compétence territoriale, c’est-à-dire quelle juridiction est compétente en fonction de critères géographiques.

Concernant la compétence d’attribution, c’est en principe le tribunal judiciaire qui est compétent pour les litiges en matière civile (article L. 211-3 du Code de l’organisation judiciaire). Mais c’est par exemple le tribunal de commerce qui sera compétent pour les litiges entre commerçants et pour ceux relatifs aux actes de commerce ou aux sociétés commerciales (article L. 721-3 du Code de commerce).

Concernant la compétence territoriale, la juridiction compétente est en principe celle du lieu où demeure le défendeur (article 42 du Code de procédure civile). Par exemple, dans le cadre d’un litige entre deux particuliers, la juridiction compétente est le tribunal judiciaire du lieu du domicile du défendeur.

La clause attributive de juridiction permet donc de déroger à ces règles. Mais cette dérogation n’est possible qu’à certaines conditions.

Dans la suite de cet article, nous distinguerons selon que la clause attributive de juridiction détermine :

  • la juridiction territorialement compétente ; ou
  • la juridiction matériellement compétente.

 

La clause attributive de juridiction territoriale

Les conditions de validité de la clause attributive de juridiction

La clause attributive de juridiction n’est valable que si deux conditions sont respectées. Ces conditions sont fixées par l’article 48 du Code de procédure civile, qui dispose que :

« Toute clause qui, directement ou indirectement, déroge aux règles de compétence territoriale est réputée non écrite à moins qu’elle n’ait été convenue entre des personnes ayant toutes contracté en qualité de commerçant et qu’elle n’ait été spécifiée de façon très apparente dans l’engagement de la partie à qui elle est opposée. »

Ainsi, la clause attributive de juridiction ne peut être stipulée que dans les contrats conclus entre commerçants. Plus précisément :

  • chaque partie doit avoir la qualité de commerçant. Cette qualité de commerçant est requise au jour de la conclusion du contrat (CA Paris, 4 oct. 2012, n° 11/03128). Bien sûr, elle peut s’appliquer aussi bien aux personnes physiques qu’aux personnes morales. Ainsi, une société commerciale qui conclut un contrat pour les besoins de son activité est considérée comme une personne ayant contracté en qualité de commerçant (CA Toulouse, 16 juin 2010, n° 08/06419).
  • les parties doivent avoir conclu le contrat en leur qualité de commerçant, c’est-à-dire dans le cadre de leur activité professionnelle. Cela signifie que la clause attributive de juridiction stipulée dans le cadre de la vie privée d’au moins une des parties n’est pas valable.

Ensuite, la clause attributive de juridiction doit respecter des conditions de forme ; elle doit être spécifiée de manière très apparente dans l’engagement de la partie à qui elle est opposée.

Ce caractère très apparent est apprécié souverainement par les juges du fond (Cass. Civ. 2ème , 20 févr. 1980, n° 78-14.437).

La jurisprudence a précisé que « le caractère apparent d’une telle clause exigé par l’article 48 du Code de procédure civile doit être entendu comme étant une présentation de la clause manifestant sans équivoque sa connaissance par les parties intéressées » (CA Orléans, 27 septembre 2018, n° 18-00577).

L’idée est donc que la partie à qui la clause est opposée ait bien eu une connaissance non équivoque de la clause. C’est pourquoi la clause contenue dans les conditions générales est valable si la partie à laquelle elle est opposée en avait connaissance (Cass. Com., 4 oct. 1988, n° 86-18.648).

Concrètement, les juges regardent l’emplacement de la clause, la taille et la lisibilité des caractères. Ainsi, si la clause n’est pas écrite avec une police lisible et ne se démarque pas du reste du contrat, elle ne sera pas valable. Par exemple, dans un jugement du 27 avril 2020, le Tribunal de commerce de Paris a jugé qu’une clause attributive de juridiction n’était pas valable aux motifs qu’elle était rédigée en petits caractères dans la même très petite taille de police que l’ensemble du texte des conditions générales, et ne se différenciait pas des autres paragraphes. En particulier, une autre clause des conditions générales était en gras alors que la clause attributive de juridiction ne l’était pas.

Les effets de la clause attributive de juridiction

Si la clause attributive de juridiction est bien valable, le demandeur doit assigner le défendeur devant la juridiction désignée par la clause.

Toutefois, si la clause a été stipulée dans l’intérêt exclusif d’une partie, celle-ci conserve, en tant que demandeur, le choix d’assigner devant la juridiction désignée par la clause ou devant celle du lieu où demeure le défendeur (Cass. Civ. 2ème, 1er avril 1981, n° 79-15.762).

 

La clause attributive de juridiction matérielle

En ce qui concerne la compétence matérielle, la clause attributive de juridiction n’est en principe pas valable. En tout cas, la doctrine considère que la clause n’est pas valable lorsqu’elle attribue la compétence à une juridiction d’exception.

Par exemple, deux particuliers ne peuvent pas prévoir une clause attributive de juridiction donnant compétence au tribunal de commerce.

Et dans un acte mixte (c’est-à-dire un acte conclu entre un civil et un commerçant), la clause attributive de juridiction au bénéfice du tribunal de commerce est inopposable au défendeur non-commerçant (Cass. Com. 10 juin 1997, n° 94-12.316). Il pourra donc soulever l’incompétence du tribunal de commerce.

En revanche, la jurisprudence a jugé que la clause attributive de juridiction conclue entre commerçants et donnant compétence au tribunal judiciaire était valable (CA Paris, 14 oct. 2008).

 

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