Clause pénale : définition et pouvoir modérateur du juge

Par Maxime Bizeau, Avocat de formation, diplômé de l'école d'avocats du Barreau de Paris

clause pénale

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La clause pénale : définition

La clause pénale est une clause très souvent utilisée dans les contrats.

Il s’agit de la stipulation par laquelle les parties fixent forfaitairement et de manière anticipée le montant des dommages-intérêts dus par l’une des parties à l’autre en cas d’inexécution de ses obligations contractuelles.

La clause pénale ne doit donc pas être confondue avec l’indemnité d’immobilisation qui, dans le cadre de la promesse unilatérale de vente, correspond à la somme que versera le bénéficiaire de la promesse au promettant, si le contrat de vente n’est finalement pas conclu. L’indemnité d’immobilisation n’est en effet pas due par le bénéficiaire en raison de l’inexécution de ses obligations contractuelles, puisque dans la promesse unilatérale de vente seul le promettant s’oblige. C’est en cela qu’elle se distingue de la clause pénale.

La clause pénale doit également être distinguée de la clause de dédit, qui permet à une partie de se soustraire à ses obligations, moyennant une contrepartie financière due à l’autre partie. La clause de dédit n’est donc ni plus ni moins qu’un droit de résiliation unilatérale, moyennant une indemnité. L’objet de l’indemnité n’est pas de réparer le préjudice subi par l’autre partie du fait de l’inexécution des obligations contractuelles, mais de compenser le droit de « sortir » du contrat dont dispose le bénéficiaire de la clause de dédit.

L’intérêt de la clause pénale est non seulement de prévoir ce qu’il adviendra en cas d’inexécution de ses obligations par le débiteur, mais également d’inciter le débiteur à bien exécuter ses obligations contractuelles.

Prenons un cas concret pour bien comprendre l’idée. Admettons que vous soyez locataire d’un appartement. Votre contrat de bail stipule que si vous ne payez pas le loyer le 5 de chaque mois, alors vous devrez verser à votre bailleur une indemnité égale au montant du loyer augmenté de 30%. Nul doute que vous allez alors bien faire en sorte de payer votre loyer le 5 de chaque mois, et pas avec un jour de retard !

La clause pénale fait donc échec au pouvoir souverain d’appréciation normalement réservé au juge pour ce qui concerne l’allocation de dommages-intérêts.

Pour autant, le juge dispose tout de même d’un certain pouvoir modérateur en ce qu’il peut, si la clause pénale est manifestement excessive ou dérisoire, la réviser.

 

La clause pénale : le pouvoir modérateur du juge

Il faut ici distinguer selon que l’inexécution par le débiteur de ses obligations contractuelles est totale ou seulement partielle.

En cas d’inexécution totale

L’article 1231-5 al. 1er du Code civil dispose que : « lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l’exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l’autre partie une somme plus forte ni moindre ».

Toutefois, l’alinéa 2 de ce même article dispose que : « néanmoins, le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire ».

Cette disposition est d’ordre public. Toute clause qui contreviendrait à cette possibilité laissée au juge serait réputée non-écrite (article 1231-5 al. 4 du Code civil).

L’idée est que si la pénalité prévue par la clause pénale est beaucoup trop élevée (ou au contraire beaucoup trop faible) par rapport au préjudice effectivement subi par le créancier, alors le juge pourra en modifier le montant.

Ce pouvoir du juge constitue une remise en cause du principe de force obligatoire des conventions. C’est pourquoi la révision judiciaire doit demeurer l’exception : elle n’est justifiée qu’en cas d’écart excessif entre le préjudice subi par le créancier et le montant que doit payer le débiteur.

Reprenons l’exemple précédent de la clause pénale insérée dans un contrat de bail. Admettons que l’indemnité devant être versée au bailleur en cas de retard de paiement du loyer soit non plus du montant du loyer majoré de 30% mais plutôt du montant du loyer majoré de 3000%. Si le paiement du loyer intervient quelques jours après la date butoir, alors une telle indemnité apparaît excessive par rapport au préjudice effectivement subi par le créancier. Une telle clause pourrait donc être qualifiée de manifestement excessive.

Inversement, si vous payez votre loyer avec plusieurs mois de retard, et que la clause pénale dans votre contrat de bail stipule qu’en cas de retard de paiement du loyer, l’indemnité due au bailleur est seulement égale à 1% du montant du loyer, alors on peut raisonnablement penser qu’il s’agit d’une clause manifestement dérisoire.

En cas de clause pénale manifestement excessive ou dérisoire, le juge est souverain pour fixer le montant de la pénalité au regard du préjudice effectivement subi par le créancier. Il est par exemple possible de réduire l’indemnité à seulement 1 euro (Cass. Com., 14 févr. 1997).

En cas d’inexécution partielle

L’article 1231-5 al. 3 du Code civil dispose que : « lorsque l’engagement a été exécuté en partie, la pénalité convenue peut être diminuée par le juge, même d’office, à proportion de l’intérêt que l’exécution partielle a procuré au créancier, sans préjudice de l’application de l’alinéa précédent ».

Tout comme en cas d’inexécution totale, il s’agit d’une disposition d’ordre public et toute clause contraire serait réputée non-écrite (article 1231-5 al. 4 du Code civil). Par conséquent, le juge ne sera pas tenu par une clause pénale qui stipulerait qu’en cas d’inexécution partielle, aucune réduction de la pénalité prévue ne serait possible.

Quel est le sens de l’article 1231-5 al. 3 du Code civil ? Très simplement, si le débiteur a partiellement exécuté ses obligations, alors le juge peut diminuer la pénalité prévue dans la clause pénale proportionnellement au taux d’inexécution. Si par exemple votre loyer est de 1000 euros et que vous en avez payé 500, alors vous avez bien exécuté partiellement votre obligation de paiement du loyer. Mais il vous reste 500 euros à payer. Le taux d’inexécution est ici de moitié. Le juge pourra donc réduire de moitié le montant de l’indemnité prévue dans la clause pénale afin de la faire correspondre au préjudice effectivement subi par le créancier, qui est moins important qu’en cas d’inexécution totale.

C’est pour cette raison que l’article 1231-5 al. 3 du Code civil ne confère pas au juge le pouvoir d’augmenter la pénalité, mais seulement le pouvoir de la diminuer. Une exécution partielle des obligations contractuelles ne peut en effet que réduire le préjudice subi par le créancier par rapport à une inexécution totale.

On remarque également que l’article 1231-5 al. 3 du Code civil est applicable « sans préjudice de l’application de l’alinéa précédent », c’est-à-dire sans préjudice de l’application de l’alinéa 2 qui consacre le pouvoir modérateur du juge en cas de clause manifestement excessive ou dérisoire. Cela signifie que même en cas d’inexécution partielle, si la clause pénale est manifestement excessive ou dérisoire, alors le juge pourra souverainement en réduire ou en augmenter le montant, et non pas seulement en diminuer le montant « à proportion de l’intérêt que l’exécution partielle a procuré au créancier ».

 

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