La personnalité juridique : définition, acquisition et fin

Par Maxime Bizeau, Avocat de formation, diplômé de l'école d'avocats du Barreau de Paris

personnalité juridique

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La personnalité juridique : définition

La personnalité juridique est l’aptitude à être titulaire de droits et de devoirs.

La personnalité juridique doit être distinguée de la capacité juridique. La capacité juridique désigne l’aptitude à avoir des droits et des obligations et à les exercer soi-même.

Les droits qu’une personne a la capacité d’exercer augmentent à la majorité (le droit de vote par exemple), mais peuvent être diminués en raison de l’état de la personne, si elle devient incapable. Par exemple, une personne sous tutelle n’aura plus la capacité pour exercer tous ses droits.

Ainsi, la capacité juridique d’une personne peut changer. Mais une personne ne peut pas perdre sa personnalité juridique de son vivant.

 

L’acquisition de la personnalité juridique

 

L’acquisition de la personnalité juridique à la naissance

Le principe est que la personnalité juridique s’acquiert par la naissance, si l’enfant nait vivant et viable.

L’enfant doit donc remplir deux conditions pour se voir reconnaître la personnalité juridique. Le premier critère (être vivant) est clair et n’appelle pas de commentaires particuliers. En ce qui concerne le critère de viabilité, il faut savoir qu’est non viable un enfant qui n’est pas né avec les organes nécessaires et suffisamment constitués pour lui permettre de vivre. Ainsi, l’enfant qui naît trop prématurément et dont le décès est inévitable n’a pas la personnalité juridique.

La déclaration de naissance doit être faite dans les cinq jours après la naissance auprès de l’officier d’état civil du lieu de naissance (article 55 du Code civil). Elle peut être faite par quiconque (article 56 du Code civil).

A noter que si l’enfant décède juste après sa naissance, un acte de naissance est dressé, suivi d’un acte de décès (article 79-1 du Code civil).

Il existe une exception au principe d’acquisition de la personnalité juridique à la naissance. Il s’agit de l’enfant sans vie. L’enfant qui naît sans vie n’a pas la personnalité juridique. Dans un tel cas, l’officier d’état civil établit un acte d’enfant sans vie (article 79-1 du Code civil).

Il faut que l’enfant soit né vivant mais non viable, ou qu’il soit mort-né, c’est-à-dire mort au moment d’un accouchement spontané ou provoqué pour raison médicale. L’enfant n’est donc pas considéré comme mort-né en cas de fausse couche ou d’interruption volontaire de grossesse.

A la suite de l’acte d’enfant sans vie, l’existence de l’enfant peut être inscrite dans le livret de famille et les parents peuvent lui donner un ou des prénoms, ainsi qu’un nom de famille (article 79-1 alinéa 2 du Code civil). Mais il faut bien comprendre que cette inscription de prénoms et nom n’emporte aucun effet juridique (elle ne conduit pas à la reconnaissance de la personnalité juridique).

En outre, la famille peut revendiquer le corps de l’enfant dans les 10 jours suivant l’accouchement (article R1112-75 du Code de la santé publique).

 

L’absence de personnalité juridique avant la naissance

La personnalité juridique n’est pas reconnue à l’enfant qui n’est pas né.

Théoriquement, l’enfant qui n’est pas encore né ne pourrait donc pas être titulaire de droits et d’obligations. Mais l’enfant à naître peut bénéficier de certains droits si cela est dans son intérêt. C’est ce que permet la théorie de l’infans conceptus, qui est un principe général du droit (Cass. Civ. 1ère, 10 déc. 1985).

Pour bénéficier de la théorie de l’infans conceptus, l’enfant doit d’abord avoir été conçu au moment de l’évènement qui conditionne l’existence du droit en question. L’enfant est considéré par la loi comme conçu pendant la période du 300ème jour au 180ème jour avant la naissance (article 311 du Code civil).

Il doit également y avoir pour l’enfant conçu un intérêt, un avantage.

Enfin, l’enfant doit ultérieurement naître vivant et viable.

En vertu de la théorie de l’infans conceptus, on considère que l’enfant à naître est né chaque fois que cela est dans son intérêt. Cela lui permet de bénéficier de certains droits, comme s’il avait la personnalité juridique. Par exemple, la théorie de l’infans conceptus permet à l’enfant qui n’est pas né de recueillir une succession (article 725 du Code civil) ou une libéralité testamentaire (article 906 du Code civil).

Par ailleurs, même si la personnalité juridique n’est pas reconnue à l’enfant à naître, il existe un principe général de protection de la vie humaine prénatale. On retrouve plusieurs applications de ce principe dans la loi. Ainsi, la loi interdit la création d’embryons à des fins industrielles ou commerciales, depuis les lois bioéthiques du 29 juillet 1994 (article L2151-3 du Code de la santé publique). De plus, la recherche sur ceux-ci est fortement règlementée (article L2151-5 du Code de la santé publique).

Il n’existe toutefois pas de protection pénale de l’enfant à naître. Si un tiers cause la mort d’un embryon in utero, il ne sera pas pénalement sanctionné (Cass. Ass. Plén. 29 juin 2001), au motif qu’il n’existe pas d’incrimination particulière et que la loi pénale s’applique de manière stricte.

 

La fin de la personnalité juridique

 

Le principe est que la mort entraîne la perte de la personnalité juridique. Mais il faut toutefois distinguer deux situations :

  • La mort certaine : Il s’agit du cas où l’on est certain que la personne est décédée.
  • La mort incertaine : Il s’agit du cas où il existe un doute sur la mort de la personne (par exemple, la personne a disparu).

 

La mort certaine

Les conditions du décès

A quel moment une personne doit être considérée comme décédée ? Au moment de l’arrêt des fonctions respiratoires, cardiaques ou cérébrales ? On considère qu’une personne est décédée au moment de la mort cérébrale (article R1232-1 du Code de la santé publique). Trois conditions doivent être remplies :

  • L’absence totale de conscience et d’activité motrice
  • L’abolition de tous les réflexes du tronc cérébral
  • L’absence totale de ventilation spontanée

La mort est constatée dans un acte de décès, dressé selon les dispositions de l’article 78 du Code civil. Cet acte doit contenir certaines mentions comme le jour, l’heure et le lieu du décès, les prénom, nom, profession et domicile de la personne décédée ainsi que ceux de ses père et mère (article 79 du Code civil).

Les effets du décès

Outre la perte de la personnalité juridique, le décès a des effets tant patrimoniaux qu’extrapatrimoniaux.

Les effets patrimoniaux sont les suivants :

En ce qui concerne les effets extrapatrimoniaux, il faut noter que le décès entraîne la dissolution du mariage (article 227 du Code civil), ainsi que celle du PACS (Pacte Civil de Solidarité) (article 515-7 du Code civil).

Le sort du cadavre

Après la mort, le cadavre intègre le domaine des choses.

Pour autant, le cadavre, ainsi que les cendres qui restent si le corps a été donné à la crémation, doivent être traités avec respect, dignité et décence (article 16-1-1 du Code civil). En particulier, la Cour de cassation a jugé qu’une exposition de cadavres à des fins commerciales méconnait les exigences de respect, dignité et décence (Cass. Civ. 1ère, 16 sept. 2010, Our Body).

Le cadavre est également protégé pénalement : l’atteinte à l’intégrité du cadavre est sanctionnée d’un an d’emprisonnement et de 15.000 euros d’amende (article 225-17 du Code pénal).

En ce qui concerne le prélèvement d’organes, il pourra y être procédé si l’individu ne l’a pas refusé de son vivant (article L1232-1 du Code de la santé publique). Depuis une loi du 26 janvier 2016, l’inscription sur un registre national est considérée comme le principal mode d’expression du refus aux prélèvements d’organes. Le refus peut être donné par toute personne âgée de plus de treize ans. Sans opposition, le prélèvement d’organes pourra avoir lieu une fois la mort constatée. A noter que ce prélèvement ne peut être effectué qu’à des fins thérapeutiques ou scientifiques.

 

La mort incertaine

Tant que la mort ne survient pas, la personnalité juridique demeure. Mais il existe des cas où on ne sait pas si la personne est en vie ou décédée. Il s’agit de l’absence et de la disparition.

L’absence

L’absence est le fait pour une personne d’avoir cessé de paraître au lieu de son domicile ou de sa résidence sans que l’on en ait eu de nouvelles (article 112 du Code civil).

En cas d’absence, la procédure est divisée en deux étapes successives : d’abord la présomption d’absence, puis la déclaration d’absence.

La présomption d’absence peut être demandée par toute personne intéressée ou le ministère public et est constatée par le juge des tutelles (article 112 du Code civil). Elle fait présumer que l’individu est vivant. Ainsi, ce dernier conserve sa personnalité juridique. Le juge peut désigner des proches ou parents du présumé absent pour exercer ses droits ou administrer ses biens (article 113 du Code civil).

Si le présumé absent réapparaît ou donne des nouvelles, il est mis fin, sur sa demande, aux mesures prises pour sa représentation et l’administration de ses biens ; il recouvre alors les biens gérés ou acquis pour son compte durant la période de l’absence (article 118 du Code civil).

La présomption d’absence peut être suivie par une déclaration d’absence. Le tribunal judiciaire déclare l’individu absent à la requête de toute personne intéressée ou du ministère public si :

  • Il s’est écoulé 10 ans depuis le jugement constatant la présomption d’absence ; ou
  • Il s’est écoulé 20 ans depuis que la personne, sans donner de nouvelles, a cessé de paraître à son domicile ou sa résidence, quand aucun jugement constatant la présomption d’absence n’a été rendu (article 122 du Code civil).

Le jugement déclaratif d’absence emporte tous les effets du décès (article 128 du Code civil) : le déclaré absent perd ainsi la personnalité juridique.

Si l’absent réapparaît, le jugement déclaratif d’absence peut être annulé à la requête du procureur de la République ou de tout intéressé (article 129 du Code civil). L’absent recouvre ses biens (article 130 du Code civil), mais le mariage de l’absent reste dissous (article 132 du Code civil).

La disparition

La disparition peut correspondre à deux situations :

  • La personne a disparu dans des circonstances de nature à mettre sa vie en danger et son corps n’a pas pu être retrouvé (exemples : un accident d’avion, un naufrage…). Son décès est donc probable ; ou
  • Le décès de la personne est certain, mais son cadavre n’a pas pu être retrouvé (article 88 du Code civil).

Le décès du disparu peut être déclaré à la requête de toute personne intéressée ou du procureur de la République (article 88 du Code civil). Le tribunal compétent est le tribunal judiciaire du lieu de la mort ou de la disparition (article 89 du Code civil).

La date du décès sera fixée en tenant compte des présomptions liées aux circonstances et, à défaut, du jour de la disparition (article 90 du Code civil). A la date du décès, le disparu perd sa personnalité juridique. Les effets sont alors les mêmes que ceux produits par un jugement déclaratif d’absence, y compris en cas de retour du disparu.

 

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