Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes

Par Maxime Bizeau, Avocat de formation, diplômé de l'école d'avocats du Barreau de Paris

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Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes : définition

Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, ou droit à l’autodétermination, est le principe du droit international selon lequel chaque peuple peut librement choisir son statut politique, en dehors de toute influence étrangère.

Plus précisément, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes comporte deux dimensions distinctes :

  • une dimension interne : le droit d’obtenir le statut de son choix à l’intérieur d’un pays
  • une dimension externe : le droit à l’indépendance, qui reconnaît à une population la possibilité de se séparer d’un Etat pour s’ériger en Etat indépendant

 

La consécration du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes

Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes est consacré dans la Charte des Nations unies de 1945 aux articles 1, § 2 et 55. En particulier, l’article 1, § 2 de la Charte affirme que l’un des buts de l’ONU est de « développer entre les nations des relations amicales fondées sur le respect du principe de l’égalité de droits des peuples et de leur droit à disposer d’eux-mêmes, et prendre toutes autres mesures propres à consolider la paix dans le monde ».

Par la suite, plusieurs résolutions de l’Assemblée générale des Nations unies ont réitéré ce principe du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Certes, les résolutions de l’Assemblée générale n’ont pas de valeur juridique contraignante. Toutefois, l’Assemblée générale a un rôle d’interprétation de la Charte des Nations unies. Dès lors, ses résolutions éclaircissent et complètent les stipulations de la Charte.

On peut citer la résolution 1514 (XV) de 1960 dans laquelle l’Assemblée a proclamé la nécessité de mettre fin au colonialisme sous toutes ses formes et dans toutes ses manifestations et déclaré que tous les peuples ont le droit de libre détermination.

En outre, l’Assemblée Générale des Nations Unies a adopté deux pactes dans sa résolution 2200 A (XXI) de 1966 : le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC). L’article premier de ces deux pactes (qui est identique) affirme que :

« Tous les peuples ont le droit de disposer d’eux-mêmes. En vertu de ce droit, ils déterminent librement leur statut politique et assurent librement leur développement économique, social et culturel.

Pour atteindre leurs fins, tous les peuples peuvent disposer librement de leurs richesses et de leurs ressources naturelles, sans préjudice des obligations qui découlent de la coopération économique internationale, fondée sur le principe de l’intérêt mutuel, et du droit international. En aucun cas, un peuple ne pourra être privé de ses propres moyens de subsistance.

Les Etats parties au présent Pacte, y compris ceux qui ont la responsabilité d’administrer des territoires non autonomes et des territoires sous tutelle, sont tenus de faciliter la réalisation du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, et de respecter ce droit, conformément aux dispositions de la Charte des Nations unies.« 

La Cour internationale de justice (CIJ), quant à elle, a reconnu que le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes constitue « un des principes essentiels du droit international contemporain » et a un effet erga omnes, c’est-à-dire qu’il est opposable à tous (CIJ, Affaire du Timor Oriental, 1995).

 

Le contenu du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes

Les bénéficiaires du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes

Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ne s’applique qu’aux peuples :

  • « soumis à une subjugation, à une domination et à une exploitation étrangère » (résolution 1514 de l’Assemblée générale de l’ONU) ; et
  • dont le territoire est « géographiquement séparé et ethniquement ou culturellement distinct du pays qui les administre » (résolution 1541 de l’Assemblée générale de l’ONU).

Ces deux critères doivent être remplis. Dès lors, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes a par exemple bénéficié aux peuples colonisés, qui ont pu créer de nouveaux États indépendants des puissances coloniales. Toutefois, il n’a pas été reconnu aux minorités présentes dans un Etat existant (nous en reparlerons dans la suite de cet article).

Les modalités d’application du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes

L’organisation d’une consultation populaire d’autodétermination est la voie conseillée par les organes internationaux pour exercer le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes (Avis consultatif de la CIJ du 16 octobre 1975 relatif au Sahara occidental).

Ainsi, le 12 décembre 2021, s’est tenu le troisième et dernier référendum sur l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie (l’accord de Nouméa de 1998 prévoyait l’organisation d’un troisième scrutin en cas de deux victoires successives du « non »). Lors de cette dernière consultation référendaire, le « non » l’a emporté avec 96,50% des voix (avec un taux de participation de 43,87%).

Toutefois, la réalisation du droit des peuples à disposer d’eux mêmes peut poser des problèmes de mise en œuvre. En particulier, certaines consultations référendaires échouent à obtenir le soutien de la communauté internationale et voient donc leur portée limitée.

Par exemple, dans le cadre du conflit russo-ukrainien, l’Assemblée générale des Nations unies a condamné les référendums menés par la Russie en Ukraine, déclarant que « les soi-disant référendums illégaux organisés du 23 au 27 septembre 2022 dans des parties des régions ukrainiennes de Donetsk, de Kherson, de Louhansk et de Zaporijjia qui se trouvent ou se sont trouvées en partie sous le contrôle militaire temporaire de la Fédération de Russie ainsi que la tentative d’annexion illégale de ces régions qui a suivi n’ont aucune validité au regard du droit international et ne sauraient servir de fondement à une quelconque modification du statut de ces régions d’Ukraine ».

 

Le problème des minorités

On sait que le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes est applicable aux hypothèses de domination coloniale. Mais bénéficie-t-il, de la même manière, aux minorités présentes dans un Etat, qu’elles soient ethniques, religieuses, culturelles ou linguistiques ?

La réponse est sans doute négative : il semble que le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ne puisse être appliqué aux minorités, afin d’éviter l’éclatement des Etats.

Cependant, il existe en droit international un principe de respect des minorités. A ce titre, les Etats doivent assurer à leurs minorités un certain nombre de droits comme le respect de l’identité culturelle ou linguistique, la non-discrimination, etc.

 

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