Nullum crimen nulla poena sine lege : le principe de légalité criminelle

Par Maxime Bizeau, Avocat de formation, diplômé de l'école d'avocats du Barreau de Paris

Nullum crimen nulla poena sine lege

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La règle Nullum crimen nulla poena sine lege

Le principe Nullum crimen nulla poena sine lege est un principe fondamental du droit pénal. Selon ce principe, les incriminations et les peines doivent être créées par une loi.

Egalement appelé principe de légalité criminelle (ou principe de légalité des délits et des peines), il se retrouve à l’article 111-3 du Code pénal, qui dispose que :

« Nul ne peut être puni pour un crime ou pour un délit dont les éléments ne sont pas définis par la loi, ou pour une contravention dont les éléments ne sont pas définis par le règlement.

Nul ne peut être puni d’une peine qui n’est pas prévue par la loi, si l’infraction est un crime ou un délit, ou par le règlement, si l’infraction est une contravention. »

Il est également consacré à l’article 8 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, selon lequel :

« La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée. »

Ainsi, seul un texte de valeur législative peut déterminer ce qui constitue une infraction et quelle est la peine applicable.

 

Les conséquences du principe Nullum crimen nulla poena sine lege

 

La légalité des incriminations

En application de la règle Nullum crimen nulla poena sine lege, une infraction ne peut exister que si un texte de valeur législative l’a prévu. Ainsi, des faits qui ne sont pas constitutifs d’une infraction ne peuvent pas entraîner une condamnation pénale.

En conséquence, le juge ne peut pas créer d’infractions.

Bien entendu, la loi étant générale et abstraite, le juge est parfois amené à l’interpréter.

Mais en droit pénal, les possibilités d’interprétation du juge sont limitées par le principe d’interprétation stricte de la loi pénale (article 111-4 du Code pénal).

Cela signifie que le juge ne doit pas s’éloigner du sens de la loi. Si par exemple le texte est clair, le juge ne peut pas raisonner par analogie pour l’appliquer à une situation similaire mais qui n’est pas visée par le texte.

On peut toutefois légèrement nuancer ce principe d’interprétation stricte de la loi pénale. Par exemple, en raison des progrès techniques, le juge peut être conduit à appliquer un texte à une situation qui n’était pas expressément envisagée par ce texte. Ainsi, en matière de diffamation, la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ne visait que la presse écrite. Cela n’a toutefois pas empêché que l’incrimination s’étende à la diffamation par voie télévisuelle ou radiophonique (la solution a depuis été ratifiée par le législateur).

 

La légalité des peines

De même que pour les incriminations, en vertu du principe Nullum crimen nulla poena sine lege, il ne peut y avoir de peines qui n’aient pas été prévues par un texte de valeur législative. Le texte doit déterminer la nature de la peine (exemples : emprisonnement, amende…) et son quantum (exemples : durée, montant).

En conséquence, le juge ne peut pas créer de nouvelles peines ou infliger une peine qui n’est pas prévue par un texte. Il ne peut pas non plus prononcer une peine dont le quantum dépasse le maximum fixé par le texte.

 

Les limites du principe Nullum crimen nulla poena sine lege

 

Plusieurs éléments constituent des limites au principe Nullum crimen nulla poena sine lege.

 

La détermination des contraventions par le règlement

En premier lieu, il faut rappeler que l’article 111-3 du Code pénal dispose que :

« Nul ne peut être puni pour un crime ou pour un délit dont les éléments ne sont pas définis par la loi, ou pour une contravention dont les éléments ne sont pas définis par le règlement.

Nul ne peut être puni d’une peine qui n’est pas prévue par la loi, si l’infraction est un crime ou un délit, ou par le règlement, si l’infraction est une contravention. »

Ainsi, la loi détermine les faits qui constituent des crimes ou des délits, ainsi que les peines qui leur sont applicables. Cela est confirmé par :

  • l’article 34 de la Constitution, qui affirme que la loi fixe les règles concernant « la détermination des crimes et délits ainsi que les peines qui leur sont applicables ».
  • l’article 111-2 alinéa 1 du Code pénal, selon lequel « la loi détermine les crimes et délits et fixe les peines applicables à leurs auteurs ».

En revanche, c’est le règlement qui détermine les contraventions, ainsi que les peines qui leur sont applicables. L’article 111-2 alinéa 2 affirme à ce titre que :

« Le règlement détermine les contraventions et fixe, dans les limites et selon les distinctions établies par la loi, les peines applicables aux contrevenants. »

Ainsi, toutes les infractions n’ont pas nécessairement à être prévues par un texte de valeur législative. Une contravention peut tout à fait être prévue par un règlement.

 

Les textes de valeur supra-législative

En second lieu, il faut préciser que le principe Nullum crimen nulla poena sine lege n’interdit pas à un texte de valeur supra-législative de prévoir une infraction ou une peine.

Par exemple, la Constitution incrimine les manquements du président de la République.

De même, des textes internationaux peuvent prévoir des infractions pénales. A ce titre, l’article 7 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, directement applicable en droit interne, affirme que :

« Nul ne peut être condamné pour une action ou une omission qui, au moment où elle a été commise, ne constituait pas une infraction d’après le droit national ou international. »

Le principe de la légalité criminelle doit donc être entendu au sens large. Si la plupart des infractions et les peines qui leur sont applicables sont déterminées par la loi, certaines infractions sont prévues par des textes qui ne sont pas des textes législatifs.

 

Le principe de l’individualisation des peines

En troisième et dernier lieu, le principe de l’individualisation des peines vient limiter le principe de légalité criminelle.

Le principe de l’individualisation des peines permet au juge d’adapter la peine à la personnalité de chaque individu.

En particulier, puisque les textes ne déterminent que le quantum maximum de la peine, le juge est libre de fixer le quantum de son choix dans la seule limite de ce maximum. Par exemple, l’article 311-3 du Code pénal affirme que « le vol est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende ». Pour autant, en présence d’un vol, le juge n’est pas tenu de prononcer une peine de trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende. Il peut tout à fait prononcer une peine d’un an ou deux ans d’emprisonnement (par exemple), ou une peine d’amende inférieure à 45 000 euros.

En outre, le juge peut également recourir à des aménagements de la peine et à des peines de substitution.

Ainsi, si le principe de légalité criminelle l’empêche de créer des peines, le juge dispose tout de même d’une certaine marge de manoeuvre dans le choix de la peine.

 

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