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Parmi les principes directeurs du procès, certains ont pour but de garantir la justice du procès. Essentiellement, l’idée est de permettre au procès de se dérouler de manière équitable, avec un débat loyal. Le principe du contradictoire s’inscrit dans ce cadre.
Le principe du contradictoire : définition
Le principe du contradictoire signifie que chacune des parties a été mise en mesure de discuter l’énoncé des faits et les moyens juridiques que ses adversaires lui ont opposés.
Il faut en effet que chaque partie puisse défendre ses intérêts.
Le principe du contradictoire est également appelé principe de la contradiction. Le Code de procédure civile, dans ses articles 14 à 17, fait d’ailleurs référence au principe de la contradiction.
Le respect du contradictoire entre les parties
Les parties à un litige ont un droit au respect du principe du contradictoire.
D’abord, le principe du contradictoire implique que la partie jugée puisse effectivement participer à son procès. Une affaire ne peut être jugée sans que l’adversaire n’en ait été informé et qu’il n’ait disposé d’un temps suffisant pour assurer sa défense. C’est ce que dit l’article 14 du Code de procédure civile, selon lequel « nulle partie ne peut être jugée sans avoir été entendue ou appelée« .
Cette règle est d’ordre public et le juge doit relever d’office son inobservation (Cass. Civ. 2ème, 10 mai 1989).
Ensuite, pendant l’instance, les parties doivent se communiquer réciproquement et en temps utile l’ensemble des éléments de fait et de droit qu’elles invoquent au soutien de leurs prétentions, afin que chacun puisse organiser sa défense (article 15 du Code de procédure civile).
Ce devoir de communication des pièces entre les parties est confirmé par l’article 132 du Code de procédure civile, qui dispose que :
« La partie qui fait état d’une pièce s’oblige à la communiquer à toute autre partie à l’instance.
La communication des pièces doit être spontanée. »
L’objet de la communication est global, dans le sens où aucun élément décisif du débat ne doit être oublié.
Et selon l’article 15 du Code de procédure civile, elle doit intervenir « en temps utile », c’est-à-dire suffisamment avant l’audience, afin que chaque partie puisse répliquer. Concrètement, la communication est tardive si l’adversaire ne dispose pas d’un temps suffisant pour assurer sa défense.
Cette communication en temps utile est appréciée souverainement par les juges, en fonction des circonstances (Cass., Ch. mixte, 26 mai 2006, n° 03-16.800). Par exemple, dans une affaire, une partie avait signifié ses conclusions à son adversaire en lui laissant trois jours et demi pour y répliquer avant la clôture de la procédure (dont un samedi et un dimanche). Les juges ont considéré que l’adversaire avait eu suffisamment de temps pour organiser sa défense, et que la communication des conclusions avait bien été faite en temps utile (CA Besançon, 20 nov. 2019, n° 19/00725).
Enfin, lorsqu’une mesure est ordonnée à l’insu d’une partie, celle-ci dispose d’un recours approprié contre la décision qui lui fait grief (article 17 du Code de procédure civile). Ainsi, si une partie a été privée de la faculté de débattre contradictoirement, le principe du contradictoire s’appliquera a posteriori, et non a priori.
Nous parlerons de ces mesures ordonnées à l’insu d’une partie dans la suite de cet article.
Le respect du contradictoire par le juge
Pendant l’instance, le juge doit contrôler le respect du principe du contradictoire par les parties (article 16 alinéa 1 du Code de procédure civile). Ainsi, il doit faire en sorte que les parties puissent débattre contradictoirement des moyens et documents qu’elles invoquent (article 16 alinéa 2 du Code de procédure civile).
Il doit également respecter lui-même le principe du contradictoire. Ainsi, il doit soumettre à la contradiction les moyens de droit qu’il relève d’office (article 16 alinéa 3 du Code de procédure civile). Cela signifie qu’il ne peut pas fonder sa décision sur des éléments autres que ceux invoqués par les parties, sans les soumettre au débat des parties (Cass. Civ., 22 mai 1878).
Et il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d’en débattre contradictoirement (article 16 alinéa 2 du Code de procédure civile).
Par exemple, dans une procédure visant à statuer sur la résidence d’un enfant né d’un couple qui s’était séparé, le juge ne pouvait pas statuer en se fondant sur l’audition de l’enfant organisée après la clôture des débats sans inviter les parties à présenter leurs observations en cours de délibéré ou ordonner la réouverture de débats (Cass. Civ. 1ère, 19 sept. 2019, n° 18-15.633). L’audition de l’enfant et son compte rendu sont en effet soumis au principe du contradictoire (article 338-12 du Code de procédure civile).
De même, dans une procédure concernant la tutelle d’une femme dont la fille demandait à être désignée comme subrogée tuteur, la Cour de cassation a considéré que les juges avaient violé le principe du contradictoire en n’informant pas la requérante du fait qu’elle pouvait prendre connaissance du dossier avant l’audience, et notamment des pièces présentées par le tuteur dont elle demandait le remplacement (Cass. Civ. 1ère, 19 sept. 2019, n° 18-19.570).
Les exceptions au principe du contradictoire
Le principe du contradictoire est rarement écarté en procédure civile. Mais il ne s’applique pas dans certaines procédures où l’adversaire ne doit pas être prévenu, ou bien a été prévenu mais ne comparaît pas.
L’ordonnance sur requête et l’injonction de payer
L’article 17 du Code de procédure civile (qu’on a déjà évoqué) dispose que :
« Lorsque la loi permet ou la nécessité commande qu’une mesure soit ordonnée à l’insu d’une partie, celle-ci dispose d’un recours approprié contre la décision qui lui fait grief. »
Ainsi, il existe des cas où la nécessité commande qu’une mesure soit ordonnée à l’insu d’une partie.
On peut citer :
- l’ordonnance sur requête, qui est rendue lorsque les circonstances exigent que des mesures urgentes ne soient pas prises contradictoirement et qui tend délibérément à un effet de surprise (exemple : pour un constat d’adultère (Cass. Civ. 1ère, 18 nov. 1992, n° 90-19.368))
- l’injonction de payer, dont l’efficacité implique de ne pas avertir l’autre partie
Aussi bien l’ordonnance sur requête que l’injonction de payer sont des décisions rendues de manière non contradictoire.
Le défaut de comparution
Il s’agit du cas où l’une des parties ne comparaît pas, c’est-à-dire qu’elle ne se présente pas au procès.
Il faut distinguer le défaut de comparution du demandeur et le défaut de comparution du défendeur.
Le défaut de comparution du demandeur
En cas de défaut de comparution du demandeur sans motif légitime, le défendeur peut requérir un jugement sur le fond qui sera contradictoire (article 468 du Code de procédure civile). En réalité, le jugement sera « dit contradictoire », puisque la contradiction n’aura pas été respectée.
Le défaut de comparution du défendeur
Le défaut de comparution du défendeur signifie qu’au jour de l’audience le défendeur n’a pas constitué avocat ou n’a pas comparu personnellement, selon les cas. Il faut préciser qu’en cas de procédure orale, le dépôt de conclusions écrites n’est pas suffisant ; il y a défaut de comparution du défendeur si celui-ci ne comparaît pas personnellement.
En cas de défaut de comparution du défendeur, l’idée est tout de même de ne pas entraver le cours de la justice ; il faut qu’un jugement soit rendu. C’est pourquoi l’article 472 alinéa 1 du Code de procédure civile dispose que « si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond ».
Pour autant, cela ne signifie pas que le juge doit faire droit aux prétentions du demandeur, simplement parce que le défendeur n’a pas comparu. L’article 472 alinéa 2 du Code de procédure civile dispose à ce titre que « le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée ».
En ce qui concerne le jugement, il faut distinguer :
- le cas où le défendeur n’a pas été entendu alors qu’il savait qu’il était appelé
- le cas où le défendeur n’a pas été entendu parce qu’il ne savait pas qu’il était appelé
Dans le premier cas, le défendeur a reçu l’assignation mais a simplement choisi de ne pas comparaître. En vertu de l’article 473 alinéa 2 du Code de procédure civile, le jugement est alors « réputé contradictoire ».
Dans le second cas, le défendeur n’a pas reçu l’assignation. A ce moment-là, il « peut, à l’initiative du demandeur ou sur décision prise d’office par le juge, être à nouveau invité à comparaître » (article 471 du Code de procédure civile).
Si le défendeur ne reçoit toujours pas l’assignation, le jugement est qualifié de jugement par défaut s’il n’est pas susceptible d’appel (article 473 alinéa 1 du Code de procédure civile). Un tel jugement pourra alors être frappé d’opposition, ce qui rétablira la contradiction. En revanche, lorsque le jugement est susceptible d’appel, l’opposition n’est pas possible.
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