La clause compromissoire : définition et régime

Par Maxime Bizeau, Avocat de formation, diplômé de l'école d'avocats du Barreau de Paris

[Cliquez ici pour télécharger 20 fiches de révisions pour réviser efficacement le droit commercial / droit des affaires]

 

La clause compromissoire : définition

La clause compromissoire est la clause insérée dans un contrat qui exclut la compétence des juridictions étatiques en cas de litige. Les parties au contrat s'engagent, si un litige survient, à recourir à l'arbitrage, c'est-à-dire à confier la résolution du litige à une ou plusieurs personnes physiques, qu'on appelle les arbitres.

A noter : Ne peut être arbitre qu'une personne physique. Si la clause compromissoire désigne une personne morale, celle-ci ne dispose que du pouvoir d'organiser l'arbitrage (article 1450 du Code de procédure civile).

L'arbitrage possède plusieurs avantages par rapport à la justice d'Etat. Il est plus discret (on évite ainsi la mauvaise publicité en cas de litige) et généralement plus rapide.

Toutefois, il peut se révéler plus coûteux que le recours aux juridictions étatiques ; il faut parfois avoir recours à des cabinets d'avocats spécialisés, et les honoraires des arbitres peuvent être très élevés. L'arbitrage peut également ne pas présenter les garanties de la justice étatique.

Par ailleurs, la clause compromissoire n'est pas le seul moyen permettant de recourir à l'arbitrage. En effet, le droit de l'arbitrage connaît deux conventions d'arbitrage : la clause compromissoire et le compromis. Le compromis est la convention par laquelle les parties à un litige déjà né décident de recourir à l'arbitrage.

Ainsi, il existe deux possibilités :

  • Soit les parties s'accordent par avance pour régler leur litige en recourant à l'arbitrage. C'est ce qu'on appelle une clause compromissoire.
  • Soit les parties décident de recourir à l'arbitrage une fois que le litige est né. C'est ce qu'on appelle un compromis, ou compromis d'arbitrage.

 

Le champ d'application de la clause compromissoire

Depuis la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, la clause compromissoire est en principe valable dans tous les contrats et cela quelle que soit la qualité des contractants. Ainsi, la clause compromissoire est valable aussi bien :

  • dans les contrats conclus entre deux professionnels
  • dans les contrats conclus entre un professionnel et un non-professionnel, c'est-à-dire les contrats de consommation
  • dans les contrats conclus entre deux non-professionnels, c'est-à-dire entre deux particuliers

A noter : Avant la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle, la clause compromissoire n'était valable que dans les contrats conclus entre professionnels.

Toutefois, la clause compromissoire est inopposable à la partie non-professionnelle. En effet, l'article 2061 alinéa 2 du Code civil issu de la loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle dispose que "lorsque l'une des parties n'a pas contracté dans le cadre de son activité professionnelle, la clause ne peut lui être opposée". Ainsi, le non-professionnel dispose d'une option : il peut choisir de se prévaloir de cette clause compromissoire afin d'avoir recours à l'arbitre, ou bien de ne pas s'en prévaloir afin de porter le litige devant une juridiction étatique.

Mais il faut remarquer que le régime de la clause compromissoire entre deux parties non-professionnelles n'est pas expressément précisé par l'article 2061 alinéa 2 du Code civil. Faut-il considérer que l'exception d'inopposabilité est limitée aux contrats entre un non-professionnel et un professionnel ou bien qu'elle peut également être invoquée dans les contrats entre non-professionnels ?

Dans la mesure où l'inopposabilité vise a priori à restaurer l'équilibre dans l'hypothèse d'un contrat entre une partie forte (le professionnel) et une partie faible (le non-professionnel), son application semble avoir vocation à rester cantonnée à cette situation. Autrement dit, dès lors que les parties sont sur un pied d'égalité, la raison d'être de l'inopposabilité disparaît. C'est pourquoi il faut considérer que la clause compromissoire est opposable au contractant non-professionnel si son cocontractant est également non-professionnel. Plusieurs auteurs se sont prononcés en ce sens (Th. Clay, L'arbitrage, les modes alternatifs de règlement des différends et la transaction dans la loi de justice du XXIe siècle, JCP G 2016, doctr. 1295 ; J. Pellerin, Commentaire de l'article 11 de la loi Justice du XXIe siècle : les nouvelles dispositions sur l'arbitrage, Gaz. Pal. 2017, dossier p. 648 , n° 32 ; Ch. Jarrosson et J.-B. Racine, Les dispositions relatives à l'arbitrage dans la loi de modernisation de la Justice du XXIe siècle, Rev. arb. 2016, p. 1007, n° 21).

Par ailleurs, en ce qui concerne les contrats conclus entre un professionnel et un non-professionnel (les contrats de consommation), il faut envisager la question de la coordination de l'exception d'inopposabilité avec l'article R. 212-2 10° du Code de la consommation en vertu duquel la clause compromissoire stipulée dans un contrat de consommation continue d'être présumée abusive, sauf au professionnel à rapporter la preuve contraire.

Ce texte, qui oblige le non-professionnel à plaider que le professionnel n’a pas réussi à apporter la preuve du caractère non abusif de la clause, ne présente aujourd'hui que peu d'intérêt pour le non-professionnel puisque ce dernier peut simplement déclarer que la clause compromissoire lui est inopposable et s’y soustraire sur le fondement de l'article 2061 alinéa 2 du Code civil.

Si toutefois le non-professionnel décidait d'invoquer l'article R. 212-2 10° du Code de la consommation pour tenter d'échapper à la clause compromissoire et que la preuve du caractère non abusif de la clause était effectivement rapportée, resterait-t-il néanmoins fondé à se prévaloir de l'exception d'inopposabilité ? Les spécialistes de la matière sont divisés sur cette question mais une réponse positive semble pouvoir être apportée : l'effectivité de l'option offerte au non-professionnel entre justice arbitrale et justice étatique postule qu'elle reste ouverte, même en présence d'une clause régulière.

 

L'efficacité de la clause compromissoire

L'efficacité de la clause compromissoire est assurée par deux principes :

  • le principe de l'autonomie de la clause compromissoire
  • le principe compétence-compétence

L'autonomie de la clause compromissoire

La clause compromissoire est dite autonome. Concrètement, cela signifie qu’elle n’est pas affectée par les éventuels vices du contrat dans lequel elle est stipulée.

Ainsi, la nullité du contrat dans lequel figure la clause compromissoire n'entraîne pas la nullité de la clause compromissoire (Cass. Civ. 2ème, 4 avril 2002, n° 00-18.009). A la différence des autres clauses du contrat, son autonomie la protège de l'anéantissement.

De même, la clause compromissoire n’est pas affectée par la caducité du contrat dans lequel elle figure (Cass. Civ. 1ère, 13 avril 2023, n° 22-14.449).

Le principe compétence-compétence

Le principe compétence-compétence joue une fois que le litige est né. Il se compose d'un effet positif et d'un effet négatif :

  • l'effet positif du principe compétence-compétence permet à l'arbitre, une fois saisi, d'être juge de sa compétence. Ainsi, l’arbitre peut se prononcer sur la question de sa propre compétence si une partie venait à contester la compétence arbitrale pour trancher le litige.
  • l'effet négatif du principe compétence-compétence impose au juge étatique qui serait saisi malgré une clause compromissoire de constater son incompétence et de renvoyer les parties devant l'arbitre afin que celui-ci détermine s'il est compétent pour connaître du litige.

En conséquence, dans le cas où le juge étatique et l'arbitre sont saisis simultanément d'un même litige, seul l'arbitre est habilité à juger de la contestation de la compétence arbitrale.

Cette règle de priorité au profit de l'arbitre écarte un contrôle a priori de la compétence arbitrale. La décision arbitrale de compétence peut simplement être contestée a posteriori devant le juge étatique.

 

[Cliquez ici pour télécharger 20 fiches de révisions pour réviser efficacement le droit commercial / droit des affaires]

Partager :

Articles similaires :

Je m’appelle Maxime Bizeau, et je suis avocat de formation, diplômé de l’école d’avocats du Barreau de Paris.

Après mon bac, je me suis lancé dans l’aventure de la licence de droit.

Mais très vite, je me suis senti submergé par la charge de travail. Des centaines et des centaines de pages à apprendre, sans savoir sur quoi se focaliser, sans savoir ce qui était réellement important et ce qui ne l'était pas.

Mes résultats étaient irréguliers, et pas à la hauteur de mes espérances.

J’ai donc décidé de changer ma méthode de travail. Plutôt que d'essayer de tout retenir, j'ai commencé à ficher mes cours régulièrement, et à relire ensuite mes fiches avant les examens.

Rapidement, mes résultats se sont considérablement améliorés.

J’ai finalement validé ma licence avec mention (13,32 de moyenne) et mon master 1 en droit des affaires avec 15 de moyenne.

Ces bons résultats m’ont ouvert les portes du prestigieux Master 2 Droit financier de l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, et des plus grands cabinets d’avocats d’affaires internationaux.

J’ai ainsi pu travailler dans des cabinets anglo-saxons très réputés à Paris, avec des gens brillants, sur des dossiers passionnants, et dans des conditions optimales.

A travers ce site, je souhaite aider un maximum d’étudiants en droit à atteindre leurs objectifs.

{"email":"Email address invalid","url":"Website address invalid","required":"Required field missing"}
>