La nullité du contrat : définition, nullité relative et nullité absolue, effets de la nullité

Par Maxime Bizeau, Avocat de formation, diplômé de l'école d'avocats du Barreau de Paris

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La nullité du contrat : définition

On peut définir la nullité comme la sanction judiciaire d’un manquement à l’une des conditions de validité du contrat. Par exemple, un contrat est nul si le consentement donné par l’une des parties a été vicié par dol.

La nullité consiste en l’anéantissement rétroactif du contrat : le contrat est annulé de manière rétroactive, on fait comme s’il n’avait jamais existé.

Nullité d'un contrat

Il faut distinguer la nullité de plusieurs autres notions.

La nullité doit d’abord être distinguée de la caducité. En effet, contrairement à un contrat nul, un contrat caduc est un contrat qui a été régulièrement formé, mais a simplement perdu, après sa conclusion, un élément nécessaire à sa validité, en raison d’un évènement indépendant de la volonté des parties. De plus, contrairement à la nullité, la caducité entraîne l’annulation du contrat seulement pour l’avenir : les effets qu’a produit le contrat avant qu’il ne devienne caduc ne doivent pas être remis en cause.

La nullité doit également être distinguée de la résolution, qui implique l’annulation rétroactive d’un contrat, non pas parce qu’il n’était pas valablement formé à l’origine, mais en raison de son inexécution ou de sa mauvaise exécution.

Il faut enfin distinguer la nullité de l’inopposabilité, qui sanctionne le défaut de publicité du contrat.  L’inopposabilité n’affecte pas la validité du contrat, mais ses effets à l’égard des tiers : les tiers peuvent en écarter les effets mais l’acte reste valable.

 

La distinction entre nullité relative et nullité absolue

Aux termes de l’article 1179 du Code civil, la nullité est absolue lorsque la règle violée a pour objet la sauvegarde de l’intérêt général. Elle est relative lorsque la règle violée a pour seul objet la sauvegarde d’un intérêt privé.

Ainsi, dans l’exemple précité du contrat nul en raison du consentement vicié par dol, il s’agit d’une nullité relative. De même, un contrat dont l’une des parties est un mineur non émancipé (incapable de contracter) est nul d’une nullité relative. Dans ces exemples, la règle violée a pour objet la sauvegarde d’un intérêt privé, celui du contractant.

En revanche, si Jean-Célestin achète 5 grammes de cannabis à Jean-Archibald, il s’agit bien d’un contrat, mais ce contrat est nul d’une nullité absolue. En effet, le contenu du contrat étant illicite, la règle violée a ici pour objet la sauvegarde de l’intérêt général.

Mais qu’est-ce que cette distinction implique au juste ? D’abord, la nullité absolue peut être invoquée par toute personne ayant un intérêt à agir, tandis que la nullité relative ne peut être invoquée que par la ou les personnes protégées par la règle violée. Ainsi, dans l’exemple de Jean-Célestin et Jean-Archibald, on peut imaginer un grand nombre de personnes pouvant demander la nullité du contrat (en dehors des parties) : leurs héritiers, leurs créanciers (par exemple la banque qui a prêté de l’argent à Jean-Célestin pour qu’il finance ses études de médecine) ou même le ministère public, qui pourrait demander la nullité de ce contrat contraire à l’ordre public et aux bonnes mœurs.

Ensuite, la nullité relative est susceptible de confirmation, tandis que la nullité absolue ne l’est pas. La confirmation est l’acte par lequel celui qui pourrait se prévaloir de la nullité y renonce. Ainsi, dans le cas d’une nullité relative, la personne protégée peut renoncer à demander la nullité du contrat. Reprenons l’exemple du contrat nul en raison du consentement vicié par dol. La victime du dol pourrait, après la conclusion du contrat, renoncer à se prévaloir de la nullité du contrat. Le contrat produirait donc ses effets alors même qu’il n’était pas valablement formé à l’origine.

 

Les effets de la nullité

Nullité totale ou nullité partielle ?

Admettons que dans un contrat seule une ou quelques clauses sont entachées de nullité. Faut-il alors annuler le contrat dans son ensemble ou simplement les stipulations qui sont illicites ?

La question ne pose pas de difficultés quand le consentement a été vicié, ou bien quand le contenu du contrat est totalement illicite. Ainsi, dans l’exemple de nos amis Jean-Célestin et Jean-Archibald, c’est bien la totalité du contrat qui doit être annulé.

Mais que faire lorsque seulement une clause ou un élément isolé du contrat est irrégulier ?

Parfois, le législateur règle la question en utilisant la solution de la clause réputée non écrite. Par exemple, dans les contrats d’adhésion, les clauses abusives sont réputées non écrites (article 1171 du Code civil). Avec cette solution, seules les clauses irrégulières sont annulées, tandis que le reste du contrat est maintenu.

Mais quelle est la solution de droit commun en l’absence de textes spécifiques réglant la question ?

L’article 1184 du Code civil dispose que « lorsque la cause de nullité n’affecte qu’une ou plusieurs clauses du contrat, elle n’emporte nullité de l’acte tout entier que si cette ou ces clauses ont constitué un élément déterminant de l’engagement des parties ou de l’une d’elles ».

Il faut donc distinguer deux cas :

  • soit les parties n’auraient pas contracté en l’absence de la ou des clauses litigieuses, et dans ce cas c’est le contrat entier qui doit être annulé ;
  • soit les parties auraient tout de même contracté même en l’absence de cette ou de ces clauses (il ne s’agissait pas d’un élément déterminant) et dans ce cas le contrat doit être maintenu.

Les effets de la nullité du contrat entre les parties : les restitutions réciproques

Comme on l’a évoqué ci-dessus, la nullité entraîne l’annulation rétroactive du contrat. Le contrat est censé n’avoir jamais existé. Il s’agit donc de revenir à la situation antérieure au contrat, en annulant tous les effets produits par le contrat depuis sa conclusion. Vous le comprenez, cela suppose des restitutions. Chaque partie doit rendre à l’autre ce qu’elle a reçu : les parties doivent être remises dans l’état dans lequel elles se trouvaient avant la conclusion du contrat.

Si une partie a reçu de l’autre partie une somme d’argent, elle doit lui rendre cet argent. Si une personne a reçu une chose, elle doit rendre cette chose à l’autre partie. Précisons que si la chose a subi des dégradations, alors la partie qui doit restituer la chose à l’autre partie est également tenue de lui verser une indemnité afin de compenser la perte de valeur de la chose en raison de ces dégradations, à moins qu’elle ne soit de bonne foi et que les dégradations ne soient pas dues à sa faute (article 1352-1 du Code civil). A l’inverse, si des frais ont été occasionnés pour la conservation de la chose, la partie qui la restitue pourra obtenir un remboursement de la part de son cocontractant.

Toutefois, on se rend bien compte que la restitution en nature est parfois impossible. C’est en particulier le cas pour les contrats à exécution successive. Prenons l’exemple d’un contrat de bail. Le locataire ne peut tout simplement pas restituer les prestations qu’il a reçues, c’est-à-dire la jouissance du bien. Dans ce cas, la restitution pourra être faite en valeur : le locataire versera une indemnité au bailleur pour compenser la jouissance du bien. En effet, l’article 1352-3 du Code civil dispose que « la restitution inclut les fruits et la valeur de la jouissance que la chose a procurée ». Le juge devra, en conséquence, évaluer la valeur de la jouissance.

Les effets de la nullité du contrat à l’égard des tiers

Comme le contrat annulé est censé ne jamais avoir existé, il faut également annuler les effets qu’il a produit à l’égard des tiers.

Par exemple, si A vend un immeuble à B et que B le revend ensuite à C, alors l’annulation du contrat entre A et B entraîne l’obligation pour C de restituer l’immeuble, en échange de la somme d’argent qu’il a versée pour l’acheter. En effet, la nullité du contrat conclu entre A et B fait que B n’était pas propriétaire de l’immeuble au moment où il l’a vendu à C : il n’a donc pas pu transmettre valablement la propriété du bien à C.

Il s’agit de l’application du fameux adage « nemo plus juris in alium transferre potest quam ipse habet » (nul ne peut transmettre plus de droits qu’il n’en a) !

Petite précision : il en va différemment en matière de meuble. En vertu de l’article 2276 du Code civil, « en fait de meubles, la possession vaut titre ». La personne qui possède un bien meuble est ainsi considérée comme le propriétaire de ce bien si elle est de bonne foi. Si l’on reprend l’exemple ci-dessus, la nullité du contrat – portant cette fois sur un meuble – conclu entre A et B n’a aucune conséquence sur C. Ce dernier n’est pas tenu de restituer le meuble à partir du moment où il est possesseur de bonne foi.

 

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  • Koffi Romina joelle dit :

    C’est parfait ! Merci

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