La différence entre une Constitution souple et une Constitution rigide
Une Constitution souple est une Constitution qui ne prévoit pas de règles spécifiques pour sa révision (c'est-à-dire pour sa modification). La révision d'une Constitution souple se fait ainsi selon la même procédure que celle utilisée pour l’élaboration des lois ordinaires.
Une Constitution rigide est une Constitution qui ne peut être révisée que par une procédure plus complexe que celle utilisée pour élaborer les lois ordinaires. Ainsi, la révision d'une Constitution rigide est effectuée par un organe distinct (exemple : les deux chambres réunies en congrès) et/ou selon des modalités différentes (exemples : vote à la majorité des deux tiers des parlementaires, référendum de ratification, etc.).
Aujourd'hui, la grande majorité des Etats possèdent une Constitution rigide. Ce système a l’avantage de protéger les droits et principes constitutionnels. Toutefois, il rend plus difficile l’adaptation de la Constitution aux évolutions de la société, ce qui peut empêcher la mise en place de réformes parfois nécessaires. Dès lors, une Constitution rigide favorise les situations de crise, pouvant potentiellement conduire à un changement de Constitution.
A l'inverse, une Constitution souple s'adapte très facilement aux évolutions de la société. Mais elle ne permet pas de protéger efficacement les droits et principes constitutionnels, ceux-ci pouvant être modifiés ou supprimés selon la procédure législative ordinaire. En outre, puisqu'elle peut être révisée selon la même procédure que celle utilisée pour les lois ordinaires, la Constitution souple perd de sa suprématie par rapport à la loi, conduisant à un aplanissement de la hiérarchie des normes.
Exemple de Constitution rigide
Un bon exemple de Constitution rigide est la Constitution française du 4 octobre 1958.
En effet, la procédure de révision de la Constitution du 4 octobre 1958 est plus complexe que la procédure d'élaboration des lois ordinaires. Ainsi, l’article 89 de la Constitution prévoit une procédure de révision structurée en trois phases : l’initiative de la révision, le vote par chacune des deux chambres et la ratification.
L’initiative de la révision appartient soit au président de la République sur proposition du Premier ministre, soit au Parlement. Dans le premier cas, on parle de projet de révision. Dans le second cas, on parle de proposition de révision.
Ensuite, le projet ou la proposition doit être adopté par les deux chambres (Assemblée nationale et Sénat) en termes identiques à la majorité des suffrages exprimés. En cas de désaccord entre les chambres, le gouvernement ne peut pas donner le dernier mot à l'Assemblée nationale (alors qu'il peut le faire dans la procédure législative ordinaire).
Enfin, après le vote des parlementaires, la révision n’est pas immédiatement adoptée. En effet, en cas de proposition de révision, la révision doit être approuvée par référendum. En cas de projet de révision, elle doit être approuvée par référendum, ou à la majorité des trois cinquièmes des suffrages exprimés des deux chambres du Parlement réunies en Congrès. C’est le président de la République qui choisit entre ces deux voies de ratification.
A noter : De même, la Constitution américaine de 1787 est une Constitution rigide. Elle peut être révisée soit sur l’initiative du Congrès par le vote des deux tiers des membres de chacune des deux chambres, soit sur l’initiative des Parlements des deux tiers des États, par une convention spécialement élue à cet effet, et dans les deux cas les amendements adoptés doivent être ratifiés par les trois quarts des États.
Exemple de Constitution souple
Un bon exemple de Constitution souple est la Constitution britannique.
En effet, le Royaume-Uni est doté d'une Constitution coutumière, et non d'une Constitution écrite (contrairement à la quasi-totalité des pays du monde). Cela signifie qu'au Royaume-Uni, les règles relatives à l'organisation de l'Etat et à l'exercice du pouvoir sont principalement issues d'usages répétés sur une longue période, qui n'ont pas été consacrés dans un texte dénommé « Constitution » (même si la Constitution coutumière du Royaume-Uni comprend également des textes de différentes époques comme la Magna Carta de 1215, le Bill of Rights de 1689 ou encore les Parliament Acts de 1911 et 1949).
Ainsi, le processus d’élaboration de la Constitution coutumière est progressif ; des règles nouvelles viennent tout naturellement s’ajouter aux précédentes pour les compléter ou pour les modifier. La révision de la Constitution se fait donc très simplement, sans solennité particulière ; un nouvel usage ou une nouvelle loi suffit à modifier la Constitution coutumière. Il n'y a absolument pas besoin de passer par une procédure plus complexe que la procédure législative ordinaire. C'est pourquoi la Constitution coutumière (et donc la Constitution britannique) est considérée comme une Constitution souple.
A noter : Les Constitutions souples ne sont pas uniquement des Constitutions coutumières. En effet, une Constitution écrite peut être souple (même si c'est très rare). Exemples : les Chartes de 1814 et 1830 en France.