Les caractères du droit de propriété

Par Maxime Bizeau, Avocat de formation, diplômé de l'école d'avocats du Barreau de Paris

caractères du droit de propriété

[Cliquez ici pour télécharger 20 fiches de révisions pour réviser efficacement le droit des biens !]

 

L’article 544 du Code civil dispose que « la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements ». Ainsi, seul le caractère absolu est envisagé par l’article 544 du Code civil. Pourtant, de ce caractère absolu découle deux autres caractères du droit de propriété : le caractère exclusif et le caractère perpétuel.

Le droit de propriété a donc un caractère absolu, exclusif et perpétuel.

 

Le caractère absolu du droit de propriété

Le droit de propriété est le droit le plus complet qu’on peut exercer sur une chose. Encore une fois, l’article 544 du Code civil prévoit que « la propriété est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus absolue ». C’est pourquoi le premier des caractères du droit de propriété est le caractère absolu.

Cela signifie qu’en principe, le droit de propriété est illimité ; le propriétaire dispose de toutes les prérogatives possibles sur son bien. Il faut bien comprendre que ce n’est pas le cas pour les autres droits réels. Ainsi, le titulaire du droit d’usufruit, ou le bénéficiaire du droit de servitude, disposent d’un droit intrinsèquement limité. L’usufruitier ne peut pas disposer de la chose ; il doit en conserver la substance afin de la restituer. De même, le bénéficiaire de la servitude peut seulement user de la servitude.

Le caractère absolu signifie aussi que le droit de propriété prime sur les autres droits. On pense notamment au droit au logement. Un occupant sans droit ni titre d’un logement appartenant à autrui pourra être expulsé pour trouble manifestement illicite. Dans un tel cas, le droit de propriété étant absolu, il est privilégié par rapport au droit au logement.

Pour autant, le principe selon lequel le droit de propriété est illimité ne signifie pas que le droit de propriété est exempt de limites. Comme tout droit, le droit de propriété peut être limité. L’article 544 du Code civil lui-même l’envisage en affirmant qu’il ne faut pas faire du droit de propriété un usage prohibé par les lois ou par les règlements. Essentiellement, le caractère absolu du droit de propriété signifie qu’il est possible de faire tout ce qui n’est pas interdit. Le caractère absolu constitue donc un principe ; le droit de propriété est en principe illimité. Mais tout principe comporte des exceptions et le droit de propriété pourra se voir limité dans certains cas.

Au-delà des limites légales et réglementaires prévues par l’article 544 du Code civil, le droit de propriété peut également être limité :

  • dans un contrat. Exemple : Deux propriétaires de fonds voisins peuvent convenir contractuellement d’établir une servitude grevant l’un des fonds au bénéfice de l’autre fonds. Dans un tel cas, le propriétaire du fonds servant verra son droit de propriété limité.
  • par la jurisprudence. On pense surtout à la théorie de l’abus du droit de propriété issue de l’arrêt Clément-Bayard, et à celle des troubles anormaux de voisinage.

Ainsi, le caractère absolu du droit de propriété doit être relativisé. Mais il reste essentiel car les deux autres caractères du droit de propriété, à savoir le caractère exclusif et le caractère perpétuel, en sont des corollaires.

 

Le caractère exclusif du droit de propriété

Le caractère exclusif du droit de propriété est le prolongement du caractère absolu.

Il signifie que le propriétaire est seul maître de son bien. Autrement dit, le droit de propriété confère au propriétaire un monopole d’utilisation, d’exploitation et de disposition de son bien. Ainsi, il peut invoquer son droit de propriété à l’égard de tous, que ce soit des tiers ou même l’Etat. En ce qui concerne l’Etat, la force du droit de propriété doit toutefois être relativisée : l’Etat peut en effet contraindre le propriétaire à céder sa propriété pour cause d’intérêt général. C’est ce qu’on appelle l’expropriation pour cause d’utilité publique (article 545 du Code civil).

Mais de manière générale, le propriétaire peut s’opposer à tout empiétement ou immixtion sur sa propriété. Pour rappel, l’empiétement est une occupation sans droit ni titre d’un bien appartenant à autrui. En matière d’immeubles par exemple, l’empiétement sera caractérisé si le propriétaire d’un terrain édifie une construction ou plante un arbre sur le terrain de son voisin. Or tout propriétaire peut obtenir la démolition d’un ouvrage empiétant sur son fonds, sans que son action puisse donner lieu à abus (Cass. Civ. 3ème, 7 novembre 1990). Il n’est pas nécessaire d’établir un préjudice ou une faute du voisin.

En particulier, le propriétaire peut s’opposer à tout empiétement d’autrui sur son terrain, même si cet empiétement est minime. La Cour de cassation a par exemple jugé qu’un mur qui dépasse de 0,5 cm sur le terrain d’autrui constitue une atteinte au droit de propriété. Dès lors, la démolition de l’ouvrage qui causait l’empiétement devait être ordonnée (Cass. Civ. 3ème, 20 mars 2002, n° 00-16.015).

En ce qui concerne la démolition systématique de tout empiétement, la jurisprudence semble toutefois avoir atténué sa position : la Cour de cassation a ainsi cassé un arrêt qui avait ordonné la démolition totale d’un garage dépassant de 0,04m2 sur la propriété du voisin alors qu’il existait une possibilité de remise en état par une démolition partielle (Cass. Civ. 3ème, 10 novembre 2016, n° 15-25.113)

Par ailleurs, il est bon de rappeler que le caractère exclusif du droit de propriété ne s’applique pas à l’exploitation de l’image du bien. Ainsi, le propriétaire peut interdire l’utilisation par un tiers de l’image de son bien seulement si cette utilisation lui cause un « trouble anormal » (Cass. Ass. Plén., 7 mai 2004, n° 02-10.450).

 

Le caractère perpétuel du droit de propriété

Le troisième et dernier caractère du droit de propriété est le caractère perpétuel. Ce caractère perpétuel emporte trois conséquences :

  • en principe, le droit de propriété n’est pas limité dans le temps : il a vocation à durer autant que son objet. En cela, le droit de propriété se distingue de l’usufruit, qui est par nature un droit temporaire. En effet, si le titulaire de l’usufruit est une personne physique, sa durée maximum est celle de la vie de son titulaire. Et si le titulaire de l’usufruit est une personne morale, l’usufruit ne peut être concédé pour une durée supérieure à 30 ans (article 619 du Code civil).
  • le droit de propriété est imprescriptible (article 2227 du Code civil) : il n’y a pas de prescription extinctive du droit de propriété. Cela signifie qu’il ne se perd pas par le non-usage, même prolongé. Exemple : Dans l’affaire dite de l’étang Napoléon, un étang avait été absorbé par la mer à cause d’une tempête. 70 ans plus tard, l’étang était de nouveau séparé de la mer à la suite de la reconstitution d’un cordon littoral. L’ancien propriétaire de l’étang a alors été réintégré dans sa propriété (Cass. Ass. Plén., 23 juin 1972, n° 70-12.960).
  • le droit de propriété est transmissible à cause de mort. Puisqu’il n’est pas limité dans le temps, il ne s’éteint pas au décès de son titulaire. C’est pourquoi il se transmet aux héritiers, qui ne reçoivent pas un nouveau droit, mais celui de leur auteur. A l’inverse, le droit d’usufruit par exemple, n’est pas transmissible à cause de mort, mais seulement entre vifs.

 

[Cliquez ici pour télécharger 20 fiches de révisions pour réviser efficacement le droit des biens !]

Partager :

Articles similaires :

Je m’appelle Maxime Bizeau, et je suis avocat de formation, diplômé de l’école d’avocats du Barreau de Paris.

Après mon bac, je me suis lancé dans l’aventure de la licence de droit.

Mais très vite, je me suis senti submergé par la charge de travail. Des centaines et des centaines de pages à apprendre, sans savoir sur quoi se focaliser, sans savoir ce qui était réellement important et ce qui ne l'était pas.

Mes résultats étaient irréguliers, et pas à la hauteur de mes espérances.

J’ai donc décidé de changer ma méthode de travail. Plutôt que d'essayer de tout retenir, j'ai commencé à ficher mes cours régulièrement, et à relire ensuite mes fiches avant les examens.

Rapidement, mes résultats se sont considérablement améliorés.

J’ai finalement validé ma licence avec mention (13,32 de moyenne) et mon master 1 en droit des affaires avec 15 de moyenne.

Ces bons résultats m’ont ouvert les portes du prestigieux Master 2 Droit financier de l'Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, et des plus grands cabinets d’avocats d’affaires internationaux.

J’ai ainsi pu travailler dans des cabinets anglo-saxons très réputés à Paris, avec des gens brillants, sur des dossiers passionnants, et dans des conditions optimales.

A travers ce site, je souhaite aider un maximum d’étudiants en droit à atteindre leurs objectifs.

  • Merci pour ces précisions c’est très utile.

  • {"email":"Email address invalid","url":"Website address invalid","required":"Required field missing"}
    >