Le contrat administratif : définition et régime

Par Maxime Bizeau, Avocat de formation, diplômé de l'école d'avocats du Barreau de Paris

contrat administratif

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La définition de contrat administratif

 

Plutôt que de recourir à un acte administratif unilatéral, l’administration peut recourir à un contrat.

Le contrat administratif est un contrat passé par une personne publique ou pour son compte, répondant à un but d’intérêt général. Il est soumis au droit administratif et relève de la compétence du juge administratif.

Tous les contrats passés par l’administration ne sont pas des contrats administratifs. Les contrats sont administratifs en vertu de la loi ou de la jurisprudence.

 

L’identification légale des contrats administratifs

La loi peut déterminer à l’avance la nature administrative du contrat. Exemples : Sont considérés comme administratifs, en vertu de la loi, les contrats comportant occupation du domaine public, les marchés publics ou encore les contrats de partenariat.

 

L’identification jurisprudentielle des contrats administratifs

Lorsque la loi est muette, le juge a recours à deux critères pour déterminer si le contrat est administratif ou non : un critère organique et un critère matériel.

Le critère organique

Il est nécessaire qu’au moins une personne publique soit partie au contrat pour que le contrat soit qualifié d’administratif.

Ainsi, en principe, un contrat conclu entre deux personnes privées est un contrat de droit privé (CE, Sect., 13 décembre 1963, Syndicat des praticiens de l’art dentaire du département du Nord), et ce même si l’une d’entre elles est chargée d’une mission de service public administratif (T. confl., 3 mars 1969, Soc. Interlait).

Mais un contrat conclu entre personnes privées peut être qualifié d’administratif si l’une des parties est mandataire d’une personne publique.

Le critère matériel

Si le critère organique est satisfait, le juge va vérifier le critère matériel. Pour que le contrat soit qualifié d’administratif, il faut :

  • Soit que le contrat soit en lien avec une mission de service public : Un contrat est administratif si le cocontractant de l’administration participe à l’exécution même du service public (CE, 20 avril 1956, Epoux Bertin) ou s’il permet l’exécution du service public par l’administration (CE, 20 avril 1956, Grimouard).
  • Soit que le contrat contienne une clause caractérisant un rapport de droit public : Même s’il n’est pas en lien avec une mission de service public, un contrat est administratif s’il contient une clause caractérisant un rapport de droit public (T. confl., 13 octobre 2014, SA AXA France Iard), c’est-à-dire une clause qui met en œuvre une prérogative de puissance publique, autrement dit qui institue un rapport très favorable à la personne publique (exemple : une clause qui permet à l’administration de modifier ou de mettre un terme au contrat sans l’accord du cocontractant), et ce dans un but d’intérêt général.

 

Le régime du contrat administratif

 

La formation du contrat administratif

La compétence

Pour qu’une personne publique puisse valablement conclure un contrat, elle doit être représentée par l’autorité compétente pour agir en son nom. Exemples :

  • Pour l’Etat, c’est le ministre qui doit signer le contrat (ou les personnes qui ont reçu délégation de la part du ministre).
  • Au niveau des collectivités territoriales, la conclusion du contrat est autorisée par l’assemblée délibérante.

Le choix du cocontractant

Il faut distinguer selon que le contrat administratif est un marché public ou un contrat de concession.

Les marchés publics sont les contrats conclus à titre onéreux par un ou plusieurs acheteurs publics avec un ou plusieurs opérateurs économiques, pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services. Ils doivent respecter les principes suivants :

  • le principe de liberté d’accès à la commande publique : toute personne doit avoir librement accès aux besoins des acheteurs.
  • le principe d’égalité de traitement des candidats : toute discrimination est interdite et la rédaction du cahier des charges doit être objective et ne pas orienter de choix.
  • le principe de transparence des procédures : tout soumissionnaire dont l’offre est rejetée doit pouvoir obtenir une réponse expliquant les motifs du rejet.

Les contrats de concession sont les contrats conclus par écrit, par lesquels une ou plusieurs autorités concédantes confient l’exécution de travaux ou la gestion d’un service à un ou plusieurs opérateurs économiques, à qui est transféré un risque lié à l’exploitation de l’ouvrage ou du service, en contrepartie soit du droit d’exploiter l’ouvrage ou le service qui fait l’objet du contrat, soit de ce droit assorti d’un prix. Le critère de distinction entre le marché et la concession est donc le transfert du risque d’exploitation.

Aujourd’hui, les concessions sont soumises à des règles de passation équivalentes à celles qui s’appliquent en matière de marchés publics.

 

L’exécution du contrat administratif

Les prérogatives de l’administration

Afin de faire prévaloir l’intérêt général, l’administration dispose de prérogatives, et ce même en l’absence de stipulation dans le contrat.

Le pouvoir de direction et de contrôle

L’administration peut contrôler l’activité de son cocontractant et lui imposer, par des « ordres de service », les moyens pour assurer l’exécution du contrat.

Le pouvoir de sanction

Lorsque son cocontractant commet une faute, l’administration peut le sanctionner. Deux types de sanctions existent :

  • Les sanctions pécuniaires (amendes) : Elles s’appliquent automatiquement, même si l’administration ne subit aucun préjudice.
  • Les sanctions coercitives : Elles s’appliquent en cas de faute grave du cocontractant. Exemples : L’administration peut décider d’exécuter elle-même le contrat, de remplacer le cocontractant initial par un autre, ou de résilier unilatéralement le contrat.
Le pouvoir de modification unilatérale

L’administration peut modifier le contenu du contrat et l’étendue des prestations dues par le cocontractant (CE, 2 février 1983, Union des transports publics urbains et régionaux). Mais une telle modification doit être justifiée par un but d’intérêt général.

Le pouvoir de résiliation unilatérale

L’administration peut également résilier le contrat en dehors de toute faute du cocontractant. Une telle résiliation est possible :

  • si elle est justifiée par un but d’intérêt général. A noter que le cocontractant a droit à une indemnisation intégrale des pertes subies du fait de la résiliation.
  • ou, sous réserve du respect du principe de loyauté des relations contractuelles, lorsque le contrat est entaché d’une irrégularité particulièrement grave (CE, 10 juillet 2020, Société Comptoir négoce équipements). Le cocontractant pourra alors prétendre, pour la période postérieure à la date d’effet de la résiliation, au remboursement des dépenses qui ont été utiles à la collectivité avec laquelle il s’était engagé. Si l’irrégularité en cause résulte d’une faute de l’administration, le cocontractant pourra prétendre, en plus, à la réparation du dommage imputable à cette faute.

Les droits du cocontractant

Le paiement intégral du prix

Le cocontractant a droit au paiement du prix en contrepartie de sa prestation.

A noter qu’en plus du prix figurant initialement dans le contrat, le cocontractant a également droit au paiement des prestations supplémentaires demandées par l’administration.

Le droit à l’équilibre financier du contrat

Ce droit à l’équilibre financier du contrat se matérialise à travers la théorie du fait du prince et la théorie de l’imprévision.

La théorie du fait du prince joue lorsque l’exécution du contrat est impactée par une mesure prise par l’administration contractante mais agissant à un autre titre que celui de partie au contrat. Dans un tel cas, le cocontractant a droit à une indemnité si la mesure le touche spécifiquement, ou si la mesure a une portée générale mais remet substantiellement en cause l’économie du contrat.

Quant à la théorie de l’imprévision, elle joue lorsque l’exécution du contrat se trouve totalement bouleversée par un événement imprévisible et étranger à la volonté des parties. Le cocontractant peut alors obtenir une indemnité de la part de l’administration (CE, 30 mars 1916, Compagnie générale d’éclairage de Bordeaux).

 

Le contentieux du contrat administratif

Les recours ouverts aux concurrents évincés

Le référé précontractuel

Le juge administratif peut être saisi par une personne ayant vocation à conclure un contrat administratif en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence (article L. 551-1 du Code de justice administrative).

Le référé contractuel

Après la conclusion du contrat, le juge administratif peut être saisi par une personne qui avait un intérêt à conclure le contrat, pour les mêmes motifs que dans le cas du référé précontractuel (articles L. 551-13 et suivants du Code de justice administrative).

Les recours ouverts aux tiers

Un tiers pouvant être lésé de manière directe et certaine par un contrat administratif peut exercer devant le juge un recours de plein contentieux pour contester la validité du contrat ou de certaines de ses clauses (CE, Ass., 4 avril 2014, Département du Tarn et Garonne). Un tel recours doit être exercé dans un délai de 2 mois à compter des mesures de publicité.

En outre, un tiers qui s’est vu refuser sa demande de mettre fin à l’exécution du contrat peut former devant le juge un recours de plein contentieux afin qu’il soit mis fin à l’exécution du contrat (CE, Sect., 30 juin 2017, Syndicat mixte de promotion de l’activité trans-manche).

Les recours ouverts aux parties

Les parties à un contrat administratif peuvent former devant le juge un recours de plein contentieux pour contester la validité du contrat (CE, 28 décembre 2009, Béziers I).

Par ailleurs, l’une des parties au contrat peut former devant le juge un recours de plein contentieux contestant la validité de la résiliation de ce contrat prise par l’administration et tendant à la reprise des relations contractuelles (CE, 21 mars 2011, Béziers II). La partie concernée doit exercer ce recours dans un délai de 2 mois à compter de la date à laquelle elle a été informée de la mesure de résiliation.

 

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