Le contrat d’entreprise revêt une importance majeure dans notre économie. On le retrouve dans tous les domaines : transport, restauration, hôtellerie, voyage, soins médicaux, etc…
Il faut toutefois remarquer que le Code civil ne connaît pas la notion de contrat d’entreprise, et lui préfère l’appellation de « louage d’ouvrage ».
Pour autant, l’appellation « contrat d’entreprise » s’impose aujourd’hui, pour différentes raisons (F. Labarthe, Du louage d’ouvrage au contrat d’entreprise, la dilution d’une notion in Mél. J. Ghestin : LGDJ, 2001, p. 489).
Dans cet article, nous emploierons donc essentiellement la notion de contrat d’entreprise.
Après avoir donné une définition du contrat d’entreprise, nous exposerons ses conditions de formation, ainsi que ses effets.
Le contrat d’entreprise : définition
Selon l’article 1710 du Code civil, le contrat d’entreprise est le « contrat par lequel l’une des parties s’engage à faire quelque chose pour l’autre, moyennant un prix convenu entre elles ».
Cette définition, très large, a toutefois été critiquée par la doctrine car elle ne permet pas de distinguer le contrat d’entreprise du contrat de travail ou du contrat de mandat. Les éléments de qualification du contrat d’entreprise ne ressortent pas clairement.
Grâce à la jurisprudence et à la doctrine, la définition du contrat d’entreprise s’est affinée. Aujourd’hui, on pourrait donner une définition du contrat d’entreprise qui serait la suivante :
Le contrat d’entreprise est le contrat par lequel une personne (l’entrepreneur) exécute pour une autre personne (le maître de l’ouvrage, ou client) un travail de façon indépendante, sans représentation et en échange d’une rémunération.
Cette définition permet de distinguer le contrat d’entreprise d’autres contrats voisins :
- l’absence de représentation permet de le distinguer du contrat de mandat, qui se caractérise par la mission de représentation dont est investi le mandataire
- le caractère indépendant de la prestation permet de le distinguer du contrat de travail, qui se caractérise par le lien de subordination qu’il fait naître entre le salarié et l’employeur
La formation du contrat d’entreprise
Le consentement
Le contrat d’entreprise est un contrat consensuel, formé dès l’échange des consentements, sans qu’une forme particulière ne soit requise.
Toutefois, le Code de la consommation protège le consentement du consommateur. En effet, dans le cas d’un contrat conclu à distance ou hors établissement, entre un professionnel et un consommateur, ce dernier bénéficie d’un droit de rétractation de 14 jours à compter de la conclusion du contrat (article L221-18 du Code de la consommation).
En outre, dans le cas d’un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, le Code de la consommation met à la charge du professionnel une obligation précontractuelle d’information qui conduit généralement à l’élaboration d’un écrit (article L. 111-1 du Code de la consommation).
Le prix
La détermination du prix
Le prix n’a pas nécessairement à être déterminé lors de l’échange des consentements ; sa détermination peut s’opérer ultérieurement. Le contrat d’entreprise peut donc se former sans que les parties aient convenu du prix.
Toutefois, dans le cas d’un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, le Code de la consommation impose au professionnel de communiquer au consommateur le prix avant que celui-ci ne s’engage (article L. 111-1 du Code de la consommation).
Les modalités de paiement du prix
Il existe trois manières de déterminer le prix :
- le marché à forfait qui permet de fixer, dès la conclusion du contrat, un prix ferme et définitif. Ce prix ne peut pas être révisé, sauf en cas de modification de l’ouvrage demandée par le maître (article 1793 du Code civil).
- le marché en régie, dans lequel les parties s’entendent par avance sur les éléments de détermination du prix. Exemples : les parties vont s’accorder sur un prix au mètre carré ou à l’heure.
- le marché sur facture, lorsque le prix ne peut être déterminé par l’entrepreneur qu’une fois le travail fini. Le prix est alors fixé a posteriori. En l’absence d’accord entre les parties, le maître de l’ouvrage peut demander au juge de fixer la rémunération.
Les effets du contrat d’entreprise
Les obligations de l’entrepreneur
L’obligation d’exécuter la prestation conformément aux stipulations contractuelles
L’entrepreneur doit accomplir le travail commandé et livrer le résultat de son travail au maître de l’ouvrage.
En cas d’inexécution, le maître de l’ouvrage peut mettre en œuvre les sanctions de l’inexécution de droit commun (exécution forcée en nature, réduction du prix, responsabilité contractuelle…).
Précisons que si la prestation est de nature intellectuelle, l’entrepreneur est tenu d’une obligation de moyens (il s’engage simplement à faire son possible pour exécuter son obligation, mais il ne promet pas d’atteindre un résultat déterminé). En revanche, si la prestation porte sur une chose corporelle, l’entrepreneur est tenu d’une obligation de résultat (il s’engage à procurer au maître de l’ouvrage le résultat escompté).
Par ailleurs, l’obligation peut être exécutée par l’entrepreneur lui-même ou bien par des personnes qu’il sollicite. Dans le second cas, l’entrepreneur est responsable vis-à-vis du maître de l’ouvrage des fautes commises par les personnes à qui il a confié la prestation (article 1797 du Code civil).
L’obligation d’information et de conseil
Soit le contrat d’entreprise porte sur une prestation de conseil (exemple : l’avocat qui fournit des conseils à son client dans le cadre d’une consultation juridique), soit il porte sur une prestation autre qu’une prestation de conseil, mais pour autant, accessoirement à son obligation d’exécuter la prestation, l’entrepreneur peut être tenu à une obligation de conseil et d’information. Exemples : il doit conseiller le maître de l’ouvrage quant à l’opportunité ou non d’accomplir la prestation commandée, l’informer des risques liés à la construction de la chose, du coût des travaux, etc…
Les obligations du maître de l’ouvrage
L’obligation de payer le prix
Le contrat d’entreprise est un contrat à titre onéreux. En contrepartie du travail effectué par l’entrepreneur, le maître de l’ouvrage doit payer le prix de la prestation.
Selon le contrat d’entreprise, le paiement peut avoir lieu :
- avant l’exécution de la prestation ;
- après l’exécution de la prestation ; ou
- de manière échelonnée, au fur et à mesure de l’exécution de la prestation.
L’obligation de prendre livraison et réception de la chose
Le maître de l’ouvrage doit prendre livraison de la chose (la livraison est l’acte matériel par lequel le maître de l’ouvrage retire la chose auprès de l’entrepreneur). A noter toutefois que le contrat peut imposer à l’entrepreneur de livrer la chose chez le maître de l’ouvrage.
Le maître de l’ouvrage doit également prendre réception de la chose (la réception est l’acte juridique par lequel le maître de l’ouvrage constate que la prestation a été correctement exécutée). La réception :
- peut être expresse ou tacite.
- emporte exigibilité du prix.
- transfère les risques au maître de l’ouvrage.