La garantie d’éviction : définition, conditions et effets

Par Maxime Bizeau, Avocat de formation, diplômé de l'école d'avocats du Barreau de Paris

garantie d'éviction

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Dans un contrat de vente, le vendeur a deux obligations principales : l’obligation de délivrer et l’obligation de garantir la chose vendue (article 1603 du Code civil).

La garantie que le vendeur doit à l’acquéreur a deux objets (article 1625 du Code civil) :

  • la garantie des vices cachés : il s’agit de garantir à l’acquéreur le bon usage de la chose vendue.
  • la garantie d’éviction : il s’agit de garantir à l’acquéreur la possession paisible de la chose vendue, c’est-à-dire la propriété de la chose.

Dans cet article, nous traiterons de la garantie d’éviction. Nous donnerons d’abord une définition de la garantie d’éviction. Nous nous intéresserons ensuite aux différentes garanties qui sont englobées dans la garantie d’éviction, en précisant leurs conditions d’application. Enfin, nous traiterons des effets de la garantie d’éviction.

 

La garantie d’éviction : définition

La garantie d’éviction vise à assurer à l’acheteur la possession paisible de la chose vendue après la délivrance de celle-ci.

A ce titre, la garantie d’éviction se décompose en deux garanties distinctes :

  • en premier lieu, le vendeur ne doit pas porter lui-même atteinte à la possession paisible de l’acheteur : c’est ce qu’on appelle la garantie du fait personnel.
  • en second lieu, le vendeur doit protéger l’acheteur contre les atteintes émanant de tiers : c’est ce qu’on appelle la garantie du fait des tiers.

 

La garantie d’éviction du fait personnel

La garantie d’éviction du fait personnel a pour objet de protéger l’acquéreur contre l’atteinte que pourrait porter le vendeur à sa propriété. Ainsi, le vendeur doit s’abstenir de troubler l’acheteur dans sa possession. On dit que « qui doit garantie ne peut évincer ».

Plus précisément, la garantie du fait personnel interdit au vendeur tant les troubles de fait que les troubles de droit à l’encontre de l’acquéreur.

Concernant les troubles de fait, cela signifie que le vendeur ne peut accomplir des faits qui portent atteinte à la propriété de l’acquéreur (même des faits qui eussent été licites s’ils avaient été commis par un tiers). Par exemple, le vendeur ne peut faire concurrence à son cédant d’un fonds de commerce, même si la clause de non-concurrence est expirée (Cass. Com., 15 déc. 2009, n° 08-20522).

Concernant les troubles de droit, cela signifie que le vendeur ne peut exercer une action en justice contredisant le droit de l’acheteur (par exemple, une action en justice pour se prétendre titulaire d’un droit de propriété, d’usufruit ou de servitude sur la chose vendue). S’il agit en justice, l’acheteur pourra opposer une exception de garantie et demander au juge de faire cesser le trouble par tous moyens. En revanche, bien que le vendeur ne puisse, par une action en justice, revendiquer la chose vendue, il peut toutefois exercer contre la vente une action en nullité, en rescision ou en résolution. Le vendeur garde en effet le droit de critiquer un contrat irrégulier.

Point important : cette garantie du fait personnel est d’ordre public. Ainsi, toute clause qui viendrait exclure ou limiter l’étendue de la garantie est interdite (article 1628 du Code civil).

 

La garantie d’éviction du fait des tiers

La garantie d’éviction du fait des tiers a pour objet de protéger l’acquéreur contre l’atteinte que pourraient porter des tiers à sa propriété.

Elle est toutefois plus difficile à mettre en œuvre que la garantie du fait personnel. Trois conditions doivent en effet être remplies pour que la garantie du fait des tiers s’applique :

  • Il faut un trouble de droit (un tiers se prétend titulaire d’un droit sur la chose vendue). En effet, le vendeur n’a pas à garantir l’acheteur contre les troubles de fait commis par des tiers que l’acheteur peut, seul, faire cesser.
  • Le trouble doit être antérieur à la vente (le vendeur ne garantit pas les troubles apparus postérieurement à la vente). En effet, la garantie suppose une faute du vendeur. Plus précisément, le vendeur doit avoir transmis à tort un droit dont il n’était pas titulaire au moment de la vente.
  • Le trouble doit avoir été non déclaré par le vendeur et ignoré de l’acheteur (l’acheteur ne doit pas avoir eu connaissance du droit dont le tiers se prétend titulaire sur la chose).

Comment expliquer que le vendeur soit soumis à une garantie qui lui impose de protéger l’acquéreur contre les atteintes émanant de tiers ? Très simplement : si un tiers se prétend titulaire d’un droit sur la chose vendue, cela signifie que le vendeur a vraisemblablement cédé un droit dont il n’était pas titulaire. C’est cela qui justifie sa mise en cause au titre de la garantie d’éviction du fait des tiers.

En outre, contrairement à la garantie du fait personnel, la garantie du fait des tiers n’est pas d’ordre public. A ce titre, une clause de non-garantie peut être prévue dans le contrat. Toutefois, il existe deux limites :

  • la clause ne sera pas valable si le vendeur fait preuve de mauvaise foi (c’est-à-dire s’il avait connaissance du trouble de droit).
  • si la clause couvre le risque d’éviction, elle exonère le vendeur de tous dommages-intérêts, non de la restitution du prix, sauf si l’acquéreur avait acheté à ses risques et périls (article 1629 du Code civil). Ainsi, le vendeur ne sera pas totalement protégé puisque, même en présence d’une clause de non-garantie, il devra restituer le prix à l’acquéreur, sauf si ce dernier avait acheté le bien en connaissance de cause.

 

Les effets de la garantie d’éviction

Il faut distinguer selon que l’éviction est totale (c’est-à-dire si la revendication concerne la propriété de la chose vendue) ou partielle (c’est-à-dire si la revendication ne porte que sur une partie des droits relatifs à la chose vendue ou si l’acheteur n’est évincé que d’une partie de la chose).

En cas d’éviction totale, aux termes de l’article 1630 du Code civil, l’acheteur peut demander au vendeur  :

  • la restitution du prix de la chose (étant entendu qu’il s’agit du prix payé au moment de la vente, même si la valeur de la chose s’est dépréciée depuis la vente).
  • la restitution des fruits produits par la chose, si l’acheteur est lui-même condamné à les rendre au tiers qui l’évince.
  • des dommages et intérêts en cas de préjudice subi du fait de l’éviction (étant entendu que l’acheteur n’a droit à des dommages et intérêts que s’il a éprouvé un préjudice que n’aurait pas réparé le remboursement du prix). Plus précisément, le vendeur doit indemniser l’acheteur si la valeur de la chose a augmenté depuis la vente. Cette règle découle de l’article 1633 du Code civil qui dispose que « si la chose vendue se trouve avoir augmenté de prix à l’époque de l’éviction […], le vendeur est tenu de lui payer ce qu’elle vaut au-dessus du prix de la vente ».

En cas d’éviction partielle, les règles sont différentes.

D’abord, si l’acheteur prouve qu’il n’aurait pas acheté s’il avait eu connaissance du trouble, il peut demander la résolution de la vente (article 1636 du Code civil).

Ensuite, si l’acheteur ne demande pas (ou n’obtient pas) la résolution de la vente, il demande une indemnité correspondant à la valeur de la partie de la chose dont il est évincé estimée au jour de l’éviction (article 1637 du Code civil).

 

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