Si vous êtes étudiant en droit, vous devez impérativement comprendre la distinction entre le droit objectif et les droits subjectifs.
Cet article a justement pour but d'éclairer votre lanterne ! A la fin de cet article, vous saurez en quoi consistent le droit objectif et les droits subjectifs, et quelles sont les différences entre ces deux notions.
Nous commencerons par donner une définition du droit objectif et des droits subjectifs, avant de présenter plus en détails le droit objectif et les droits subjectifs.
Sans plus attendre, c'est parti !
Définitions du droit objectif et des droits subjectifs
En droit français, le Droit avec un « D » majuscule désigne ce que l’on appelle le droit objectif, par opposition aux droits subjectifs que l’on écrit avec un « d » minuscule.
Le droit objectif vise le système juridique dans son ensemble. Il désigne l’ensemble des règles de droit, c’est-à-dire les règles régissant la vie en société (lois, règlements, etc.). Il correspond à ce que l'on désigne communément lorsque l'on cite "le" Droit.
On parle de droit objectif car les règles de droit sont envisagées de manière objective et abstraite, indépendamment de la situation individuelle des personnes.
A l'inverse, les droits subjectifs sont les prérogatives individuelles reconnues aux personnes par le droit objectif. Par exemple, le droit au respect de la vie privée et le droit de propriété sont des droits subjectifs. Si vous êtes propriétaire d'un bien immobilier, vous êtes titulaire d'un droit subjectif sur ce bien immobilier.
On parle de droits subjectifs car il s'agit de droits attribués à un sujet de droit (c'est-à-dire une personne) en particulier. A la différence du droit objectif, les droits subjectifs sont personnels et concrets ; ils visent la situation individuelle des personnes.
En définitive, le droit objectif et les droits subjectifs entretiennent des rapports très étroits : le droit objectif a pour vocation la protection des droits subjectifs, lesquels n’existent que s’ils sont reconnus par le droit objectif.
Par exemple, on a dit précédemment que le droit de propriété est un droit subjectif. Mais le droit de propriété est reconnu et encadré par l’article 544 du Code civil, qui est une règle de droit objectif.
Le droit objectif
Afin de bien comprendre ce que signifie le droit objectif, il convient d'évoquer ses caractères, ses sources et ses différentes branches.
Les caractères du droit objectif
Le droit objectif est général, obligatoire, coercitif et permanent.
Le caractère général
Le droit objectif revêt un caractère général. On dit également qu'il est abstrait, ou impersonnel. Cela signifie qu'il ne vise personne de manière individuelle.
Ainsi, le droit objectif s'applique de manière identique à toutes les personnes qui se trouvent dans la même situation juridique.
Par exemple, la réglementation relative au mariage s’applique à tous les couples mariés. De même, les couples unis par un PACS se voient tous appliquer les règles du PACS, etc.
En pratique, des formules générales comme « quiconque » ou « chacun » sont utilisées dans les règles de droit. Par exemple, l’article 9 du Code civil dispose que « chacun a droit au respect de sa vie privée ».
Le caractère obligatoire
Le droit objectif définit les comportements auxquels les personnes doivent se conformer au sein de la société. Il est donc nécessaire qu’il soit respecté par ceux à qui il s’applique. C’est pourquoi il est obligatoire : toute personne entrant dans le champ d'application d'une règle de droit doit la respecter.
Le caractère coercitif
On a dit qu'en vertu du caractère obligatoire du droit objectif, toute personne entrant dans le champ d'application d'une règle de droit doit la respecter. Mais plus encore, si une personne entrant dans le champ d'application d'une règle de droit ne la respecte pas, alors cette personne sera sanctionnée par l’autorité publique. C'est le caractère coercitif du droit objectif.
Ce caractère coercitif permet de distinguer le Droit des règles morales ou religieuses. En effet, ces règles font l'objet de sanctions différentes. En cas de violation d'une règle purement morale, la personne éprouvera des remords, des regrets, c'est-à-dire les reproches de sa propre conscience. Il s'agit de sanctions purement internes. De même, la sanction religieuse est interne, mettant uniquement en cause la personne dans ses relations avec Dieu, et non avec les institutions religieuses.
Ainsi, à la différence des règles morales ou religieuses, la violation des règles de droit est sanctionnée par la contrainte étatique.
Les sanctions de la violation d'une règle de droit sont différentes selon leur objectif qui peut être :
- la punition : cela concerne les infractions pénales. La sanction peut être une amende, une peine d’emprisonnement, des travaux d’intérêt général, etc.
- l’exécution : elle se fait par l’exécution forcée de la règle de droit par la personne qui l'a violé.
- la réparation : elle se fait par l’allocation de dommages et intérêts.
Le caractère permanent
La permanence du droit objectif ne veut pas dire qu'il est éternel. Cela signifie qu'une règle de droit reste constamment applicable tant qu'elle existe (de son entrée en vigueur jusqu'à son abrogation).
Les sources du droit objectif
Le droit objectif trouve son origine dans différentes sources. Il convient d'effectuer une distinction entre les sources principales du droit objectif et les sources complémentaires du droit objectif.
Les sources principales du droit objectif
Les sources du Droit sont hiérarchisées. C'est ce qu'on appelle la hiérarchie des normes, illustrée par la pyramide de Kelsen.
Concrètement, les différentes sources du Droit n'ont pas la même importance, et chaque norme doit être conforme aux normes qui lui sont supérieures.
La hiérarchie des normes se présente de la manière suivante :
- le bloc de constitutionnalité, qui comprend non seulement la Constitution du 4 octobre 1958, mais également le Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789, la Charte de l’environnement de 2004, les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République (PFRLR) et les principes à valeur constitutionnelle
- le bloc de conventionnalité, qui comprend les traités internationaux et le droit de l’Union européenne
- le bloc de légalité, qui correspond aux normes de valeur législative (il s’agit principalement des lois votées par le Parlement)
- le bloc réglementaire, qui correspond aux textes juridiques émanant du pouvoir exécutif (on distingue les décrets, qui émanent du président de la République ou du Premier ministre, et les arrêtés, qui émanent des autres ministres, des préfets et des maires)
En vertu de la hiérarchie des normes :
- le bloc réglementaire doit être conforme au bloc de légalité, au bloc de conventionnalité et au bloc de constitutionnalité
- le bloc de légalité doit être conforme au bloc de conventionnalité et au bloc de constitutionnalité
- le bloc de conventionnalité doit être conforme au bloc de constitutionnalité
Les sources complémentaires du droit objectif
A côté des sources principales, il existe des sources complémentaires du droit objectif : il s'agit de la jurisprudence et de la doctrine.
La jurisprudence
La jurisprudence est l’ensemble des décisions de justice rendues par les cours et les tribunaux.
De manière générale, elle n'a pas vocation à créer le Droit. En application du principe de séparation des pouvoirs, garanti par l'article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, les juges ne peuvent élaborer les lois. De même, l’article 5 du Code civil dispose que : « il est défendu aux juges de prononcer par voie de disposition générale et réglementaire sur les causes qui leur sont soumises ». Cela signifie que les juges ne peuvent prononcer des arrêts de règlement, c'est-à-dire des arrêts qui énoncent une règle générale qui serait applicable aux cas analogues. Le jugement rendu pour un litige est applicable à ce litige seul et n'établit pas un précédent qui devra obligatoirement être suivi par les autres juges.
Toutefois, le juge a un pouvoir d'interprétation du droit. Si le droit est obscur, imprécis ou ambigu, le juge devra l’interpréter, le préciser. C'est le cas, par exemple, lorsque le législateur laisse dans les textes de loi des notions générales au contenu mal déterminé : les bonnes mœurs (article 6 du Code civil), la bonne foi (article 1104 du Code civil), la vie privée (article 9 du Code civil)... Ces notions seront progressivement définies par le juge au gré des solutions données aux litiges qui lui sont soumis.
En outre, si le droit est incomplet ou silencieux sur une question juridique donnée, le juge doit tout de même rendre un jugement. Il va alors créer du droit. A ce titre, la Cour de cassation et le Conseil d'Etat créent fréquemment des règles de droit.
Le juge joue donc un rôle direct dans la création du droit. Mais il a également un rôle indirect dans l’adoption des lois en incitant le législateur à intervenir. En effet, c'est souvent le juge qui est le premier confronté à certaines situations nouvelles, le législateur n'intervenant qu'avec un temps de retard pour consacrer les solutions dégagées par le juge.
La doctrine
La doctrine désigne l’ensemble des opinions émises par les juristes (universitaires et praticiens comme par exemple les avocats). Elle se manifeste de différentes manières : traités, manuels, précis, chroniques, commentaires d'arrêt publiés dans les revues juridiques, etc.
Il ne s'agit pas d'une source formelle du droit objectif. Les opinions de la doctrine ne s'imposent à personne.
Cependant, la doctrine peut avoir une influence non seulement sur les juges, qui peuvent s’inspirer d’un avis de la doctrine pour trancher un litige, mais également sur le législateur (soit indirectement par ses travaux courants, soit plus directement lorsque le législateur demande aux auteurs de participer à l’élaboration des lois).
Les branches du droit objectif
Les règles de droit sont diverses et variées. C'est pourquoi le droit objectif est divisé en différentes branches, elles-mêmes divisées en sous-branches. La principale distinction, également appelée summa divisio, oppose le droit privé au droit public.
Le droit privé
Le droit privé est le droit qui régit les relations entre personnes privées, qu'elles soient physiques (les individus) ou morales (les entités juridiques comme par exemple les entreprises). Ainsi, il ne s'applique pas en présence d’une personne publique (nous donnerons plus bas une définition de la notion de personne publique).
A la différence du droit public, le droit privé est égalitariste et libéral ; il vise la satisfaction des intérêts privés.
Au sein du droit privé, on distingue différentes branches :
- le droit civil, qui est le tronc commun du droit privé et regroupe, entre autres, le droit des personnes, le droit de la famille, le droit des biens, le droit des obligations, le droit des contrats spéciaux et le droit des sûretés
- le droit commercial
- le droit du travail
Le droit public
Le droit public se distingue du droit privé en ce qu'il régit les relations entre personnes publiques, et entre personnes privées et personnes publiques. Les personnes publiques sont les personnes morales soumises à un régime de droit public, comme par exemple l’Etat ou les collectivités locales (régions, départements, communes).
A la différence du droit privé, le droit public a pour objectif la défense de l’intérêt général.
Au sein du droit public, on effectue une distinction entre :
- le droit constitutionnel
- le droit administratif
- le droit des finances publiques
Les droits subjectifs
A la différence du droit objectif, les droits subjectifs ont un caractère :
- personnel : ils sont liés à une personne en particulier
- concret : ils visent la situation réelle d'une personne, et non une situation générale et abstraite
Voyons maintenant quelles sont les sources des droits subjectifs, ainsi que les différentes catégories de droits subjectifs.
Les sources des droits subjectifs
Les droits subjectifs naissent soit à l’occasion d’actes juridiques, soit à l’occasion de faits juridiques.
Un acte juridique est une manifestation de volonté destinée à produire des effets de droit (c’est-à-dire des droits et des obligations). La majorité des actes juridiques sont des contrats, c'est-à-dire des actes qui imposent l’accord de deux ou plusieurs volontés. Mais il existe aussi des actes unilatéraux, qui sont l’œuvre d’une seule personne (exemple : le testament).
Un fait juridique est un agissement ou un évènement auquel la loi attache des effets de droit. Au sein des faits juridiques, on distingue :
- les faits de l'homme : ils sont liés à un comportement humain. Exemples : appréhension matérielle d’un bien, accident de circulation, coups portés à autrui…
- les faits de la nature : ils sont indépendants d'un comportement humain. Ils peuvent :
- être liés à la vie de l’homme. Exemples : la naissance, la survenance de la majorité, le décès...
- être extérieurs à la vie de l’homme. Exemples : une tempête, un ouragan, un tremblement de terre, un incendie, une grève...
La différence entre l’acte juridique et le fait juridique tient au fait que les effets de droit découlant du fait juridique ne sont pas produits par la volonté des personnes, mais par la loi elle-même. Même si le fait juridique peut, en lui-même, être volontaire, la frontière qui le sépare de l’acte juridique est que cette volonté n’est pas tournée vers la production d’un effet de droit. La personne n’a pas l’intention de produire l’effet de droit issu de ce fait juridique. Par exemple, une personne peut volontairement porter des coups à autrui, mais pour autant elle ne souhaite pas l'effet de droit produit par ses agissements, à savoir la réparation du préjudice de la victime.
A l'inverse, le ou les auteurs de l’acte juridique avaient bien la volonté de produire les effets de droit en question. Par exemple, dans un contrat de vente, les deux parties ont bien la volonté de produire des effets de droit : le vendeur souhaite transférer à l’acheteur la propriété de la chose contre un certain prix, et l’acheteur souhaite obtenir le droit de propriété sur la chose en échange de ce prix.
Les différentes catégories de droits subjectifs
Au sein des droits subjectifs, il existe une distinction entre :
- les droits patrimoniaux
- les droits extrapatrimoniaux
Les droits patrimoniaux
Les droits patrimoniaux sont les droits qui peuvent être évalués en argent. Ils font donc partie du patrimoine de la personne.
Par exemple, le droit de propriété est un droit patrimonial. Il peut être évalué en argent.
Les droits patrimoniaux se divisent en trois catégories :
- les droits réels : le droit réel est le droit qu’une personne a sur une chose corporelle. Exemple : le droit de propriété.
- les droits personnels : le droit personnel est le droit qu’a une personne d’obtenir quelque chose (donner, faire ou ne pas faire) d’une autre personne. Exemple : le locataire peut exiger du bailleur qu’il lui assure la jouissance paisible des lieux loués.
- les droits intellectuels : le droit intellectuel est le droit qu’une personne a sur une chose incorporelle. Exemples : un brevet déposé sur une invention, le droit d’un auteur sur son œuvre.
Les droits patrimoniaux sont :
- cessibles : ils peuvent être vendus ou donnés à un tiers.
- transmissibles : à la mort de la personne, ils sont transmis aux héritiers.
- saisissables : les créanciers peuvent les faire vendre et se payer sur le prix de vente.
- prescriptibles : ils peuvent se perdre s'ils ne sont pas utilisés pendant un certain temps.
Les droits extrapatrimoniaux
Les droits extrapatrimoniaux sont ceux qui ne font pas partie du patrimoine de la personne, car ils ne peuvent pas être évalués en argent.
Parmi les droits extrapatrimoniaux, on distingue :
- les libertés fondamentales. Exemples : la liberté d’expression, le droit à la vie, le droit de réunion, d’association…
- les droits politiques. Exemple : le droit de vote.
- les droits familiaux. Exemple : l’autorité parentale.
- les droits de la personnalité. Exemples : le droit au respect de la vie privée, le droit à l’image.
A la différence des droits patrimoniaux, les droits extrapatrimoniaux sont étroitement attachés à la personne, et sont donc :
- incessibles : ils ne peuvent pas être vendus ou donnés.
- intransmissibles : à la mort de la personne, ils ne sont pas transmis aux héritiers.
- insaisissables : les créanciers ne peuvent pas les saisir pour se payer.
- imprescriptibles : ils ne se perdent pas même s’ils ne sont pas utilisés pendant un certain temps.